Leçons à tirer des événements indésirables : Favoriser une culture juste en matière de sécurité dans les hôpitaux et les établissements de santé

Comment citer ce document en référence :

Leçons à retenir des événements indésirables : Favoriser une culture juste en matière de sécurité dans les hôpitaux et les établissements de santé au Canada. Ottawa (Ontario); Association canadienne de protection médicale; 2009.


Introduction

Il est notoire que les professionnels de la santé s'efforcent toujours d'obtenir les meilleurs résultats possibles pour leurs patients. Ils le font tout en reconnaissant que personne ou aucun système ne peut entièrement éliminer le risque ou la survenue d'événements indésirables. Malgré la faillibilité inhérente à la prestation des soins de santé, la communauté de la santé demeure vouée à la réduction des événements indésirables grâce à son engagement envers l'amélioration de la qualité.

Le livret décrit les exigences et les processus de déclaration des événements indésirables et des accidents évités de justesse, ainsi que la meilleure approche pour évaluer ces événements. Il explique aussi comment les membres de l'ACPM et les autres professionnels de la santé peuvent favoriser une culture juste en matière de sécurité dans les hôpitaux et les établissements de santé, qu'ils aient un rôle en leadership ou en gestion ou participent au processus de déclaration et d'évaluation. Le livret n'aborde pas la divulgation des événements indésirables aux patients, puisqu'une publication complémentaire intitulée Divulgation d’un préjudice résultant de la prestation des soins : Pour une communication ouverte et honnête avec les patients porte sur ce sujet.


La déclaration des événements indésirables et des accidents évités de justesse dans les hôpitaux et les établissements de santé

La déclaration et l'analyse des événements indésirables (et autres événements à risque ou sans risque de préjudice) représentent des occasions importantes de cerner les faiblesses du système et de mettre en place des mesures de protection pour éviter que des événements semblables ne se produisent. Le but ultime est d'évaluer de manière critique ces événements et l'efficacité des pratiques et des procédures des établissements de santé pour améliorer la sécurité des patients.

Comprendre ce qu'est un préjudice

Les changements dans l'état du patient reflètent la plupart du temps la détérioration du processus pathologique, du trouble clinique ou de l'état naturel. Toutefois, certains résultats imprévus sont liés à la prestation des soins en elle-même, et sont appelés « événements indésirables ».

La plupart des événements indésirables découlent des risques inhérents aux investigations et aux traitements. Certaines complications ou certains effets secondaires reconnus peuvent donc survenir indépendamment de la personne qui prodigue les soins. Par contre, le préjudice survient parfois en raison de défaillances du système, de problèmes de conduite du professionnel de la santé, ou encore d'une combinaison de tous les facteurs susmentionnés.

Les hôpitaux et les établissements de santé sont informés des événements indésirables et des accidents évités de justesse de diverses manières, notamment :

  • la déclaration directe par les professionnels impliqués dans l'événement indésirable ou l'accident évité de justesse;
  • les préoccupations ou les plaintes formulées par les patients ou leurs familles, ou les professionnels de la santé; et
  • les vérifications (p. ex., à l'aide d'outils déclencheurs).

La plupart des établissements de santé possèdent des politiques sur la déclaration des événements indésirables ou des accidents évités de justesse. Si tel n'est pas le cas, l'ACPM est en faveur de l'élaboration de politiques et de procédures concernant la déclaration des événements indésirables et des accidents évités de justesse. Ces politiques doivent nommer une personne ou un comité dont la fonction sera de recevoir les rapports d'incident/accident (parfois appelés rapports sur la sécurité des patients). Ces rapports ne doivent être présentés qu'à l'instance précisée dans la politique, qu'il s'agisse d'un chef en médecine ou en soins infirmiers, un gestionnaire des risques, un agent de la sécurité des patients, ou un comité d'amélioration de la qualité interne.

Point important pour les membres : Les membres prodiguant des soins en milieu hospitalier ou institutionnel doivent connaître les politiques concernant la déclaration des événements indésirables et des accidents évités de justesse, la méthode probablement utilisée pour analyser ces événements, et dans quelle mesure, le cas échéant, l'information liée aux analyses sera communiquée au patient ou à d'autres personnes.

Outre les politiques en matière de déclaration, la plupart des organismes de santé ont mis en place des systèmes de déclaration des événements indésirables et des accidents évités de justesse. Ces systèmes doivent se concentrer à recueillir uniquement des renseignements factuels, puisque les hypothèses ou les opinions peuvent engendrer des malentendus et des conclusions inexactes. Il est important de noter que les rapports d'incident/accident pourraient ne pas être protégés par les lois qui empêchent généralement l'information sur l'amélioration de la qualité d'être employée subséquemment dans des procédures judiciaires, réglementaires ou autres.

Les obligations légales concernant la déclaration des événements indésirables ou des accidents évités de justesse varient d'une province ou d'un territoire à l'autre au Canada. Les professionnels de la santé doivent savoir quels événements doivent être déclarés, quels renseignements doivent être inclus dans un rapport et comment ces rapports seront communiqués. À titre d'exemple, au Québec, la loi exige qu'un rapport d'incident/accident soit rempli pour les accidents évités de justesse dans les établissements publics tels que les hôpitaux.

Point important pour les membres : Lorsqu'ils remplissent un rapport d'incident/accident, les membres doivent fournir des faits seulement et non des énoncés de blâme, des hypothèses, des opinions ou autres commentaires concernant les raisons de l'événement, ni formuler des recommandations. Ces rapports ne sont pas en général considérés comme de l'information sur l'amélioration de la qualité et ne seront probablement pas protégés par la loi. Les rapports d'incident/accident ne doivent pas être gardés dans le dossier médical, à moins que la loi ne l'exige.1

La déclaration obligatoire des événements indésirables au-delà des hôpitaux et
des établissements de santé

Certaines provinces et certains territoires ont promulgué des lois exigeant que les établissements de santé et les hôpitaux ou les régies régionales de la santé déclarent à un représentant du gouvernement (c.-à-d. le ministre ou une agence gouvernementale) les événements indésirables ou les incidents critiques survenus dans leur établissement. Il s'agit en général d'une responsabilité de l'établissement, et les professionnels de la santé n'ont aucun rôle direct à jouer pour respecter ces obligations.


Les évaluations dans les hôpitaux et les établissements de santé

 

Bien que la déclaration des événements indésirables et des accidents évités de justesse soit importante, l'utilisation de ces rapports est tout aussi importante. Lorsqu'elles sont bien structurées, les évaluations approfondies des événements indésirables et des accidents évités de justesse sont considérées comme l'une des méthodes les plus efficaces pour améliorer la sécurité des patients dans un hôpital ou un établissement de santé.

Dans le cadre de soins en milieu hospitalier ou institutionnel, il y a deux catégories d'évaluations des événements indésirables et des accidents évités de justesse :

  1. L'évaluation en matière d'amélioration de la qualité, où l'accent est mis sur les problèmes liés au système;
  2. L'évaluation de l'acte médical, où l'accent est mis sur la conduite d'un professionnel de la santé en particulier.

L'évaluation par les pairs

Le terme « évaluation par les pairs » peut avoir différentes significations. Pour les besoins du présent livret, on entend par ce terme une évaluation rétrospective effectuée par des pairs, ou des experts en la matière, ou une personne ou un groupe de personnes se penchant sur des indicateurs précis de la qualité des soins. L'objectif consiste à relever, dans le cadre d'un processus confidentiel, les secteurs où la pratique peut être améliorée. Dans certaines conditions, une évaluation par les pairs peut être entreprise pour évaluer la compétence clinique d'une personne; de telles évaluations doivent être prises en considération conformément à un cadre de responsabilisation bien élaboré.

Les évaluations en matière d'amélioration de la qualité

Les évaluations en matière d'amélioration de la qualité servent à déterminer les raisons derrière les événements indésirables ou les accidents évités de justesse en examinant le système dans lequel les soins sont prodigués. Les résultats de ces évaluations peuvent mener à des améliorations au système dont tous les futurs patients bénéficieront.

Quelle est la structure d'une évaluation en matière d'amélioration de la qualité?

Les évaluations en matière d'amélioration de la qualité doivent relever d'un comité d'amélioration de la qualité dûment constitué. Le nom de ce genre de comité peut varier selon la province ou le territoire (p. ex., comité de la qualité des soins, comité d'assurance de la qualité, comité de gestion des risques, etc.).

La structure et les procédures d'un comité d'amélioration de la qualité doivent être prévues dans les politiques de l'hôpital ou de l'établissement en fonction des lois pertinentes de la province ou du territoire. Un comité d'amélioration de la qualité bien constitué est habituellement doté d'un mandat décrivant son but, sa structure hiérarchique, la portée de ses activités et sa composition. Les politiques des hôpitaux ou des établissements de santé peuvent aussi fournir une orientation quant aux sources ou aux éléments déclencheurs pour l'analyse d'événements, au contenu et à la conservation des documents et des procès-verbaux du comité, ainsi qu'aux instructions sur l'accès aux documents, aux procès-verbaux et aux recommandations du comité et à leur distribution.

Une fois établie dans les limites d'un comité d'amélioration de la qualité, la structure de l'évaluation favorise un examen impartial et détaillé des événements indésirables par les professionnels de la santé impliqués. Lors de l'examen des faits connus, il est souvent utile de prendre en considération ce qui aurait pu se produire ou ce que les participants auraient voulu qu'il se produise. Les discussions peuvent inclure la formulation d'hypothèses sur les faiblesses des processus du système; cela peut s'avérer un moyen utile de déterminer les raisons des résultats cliniques et d'élaborer des stratégies pour essayer d'éviter que les événements ne se reproduisent.

Point important pour les membres : Les membres doivent déterminer si le comité d'amélioration de la qualité de leur hôpital est bien constitué en vertu de la législation pertinente et obtenir l'assurance que les évaluations en matière d'amélioration de la qualité seront menées de manière confidentielle. Si tel n'est pas le cas, les membres doivent favoriser l'utilisation de comités d'amélioration de la qualité dûment constitués.

Qui procède à l'évaluation en matière d'amélioration de la qualité?

Les évaluateurs doivent être choisis en fonction de leurs compétences et de leur connaissance sur la manière d'analyser les résultats imprévus, les événements indésirables et les accidents évités de justesse, leur expertise clinique et leur capacité à provoquer des changements en réponse aux recommandations découlant de l'évaluation.

La direction et les gestionnaires doivent se soucier d'éventuels conflits d'intérêts. En général, il ne convient pas que les personnes qui jouent un rôle dans les évaluations de rendement annuels et dans les questions de responsabilité ou de discipline (p. ex., un chef de service) participent à une évaluation en matière d'amélioration de la qualité mettant en cause des professionnels de la santé qui relèvent d'elles.

Quand devrait se dérouler l'évaluation?

L'évaluation doit être effectuée le plus rapidement possible, de façon idéale dans les jours qui suivent l'événement. Ceci permet un meilleur souvenir des faits et la prise de mesures rapide pour régler les défaillances du système relevées.

Qui devrait participer à l'évaluation?

Les participants peuvent inclure tout professionnel de la santé impliqué dans les soins du patient, des experts choisis, et d'autres personnes pouvant contribuer à l'analyse de l'événement et à la formulation de recommandations pratiques pour améliorer la sécurité des patients. Une participation multidisciplinaire permet d'obtenir un point de vue plus large de l'événement et, lorsqu'elle se fait de manière respectueuse, peut renforcer les liens de collaboration professionnelle. Tous les participants doivent s'engager à respecter les conditions de participation établies, notamment à préserver la confidentialité de toute l'information et à marquer les documents destinés à l'évaluation en matière d'amélioration de la qualité

La présence des professionnels de la santé impliqués dans l'événement indésirable peut être exigée par la loi ou les politiques ou règlements de l'établissement ou de l'hôpital. D'autres personnes, y compris les patients (et/ou leurs décideurs remplaçants ou des membres choisis de leur famille), des experts cliniques, et les fabricants d'équipement peuvent être invités à participer à l'évaluation pour préciser des détails en fonction de leur point de vue ou de leur domaine d'expertise; par contre, ces personnes ne doivent pas être présentes pour toutes les discussions.

Point important pour les membres : Bien que la participation ne soit pas obligatoire, les membres de l'ACPM sont encouragés à participer à des évaluations en matière d'amélioration de la qualité bien structurées dans le but d'améliorer la sécurité des patients.

Si une évaluation en matière d'amélioration de la qualité n'est pas structurée conformément aux lois qui protègent les dossiers et l'information sur l'amélioration de la qualité, les membres doivent obtenir par écrit l'assurance que le processus d'évaluation est censé demeurer confidentiel et que les discussions et la divulgation d'information seront limitées. S'ils ont des incertitudes quant à la manière de procéder, les membres devraient communiquer avec l'ACPM pour obtenir des conseils.

Comment l'information est-elle analysée?

Un grand nombre de méthodes et d'outils acceptés peuvent être employés, comme l'analyse des causes souches (réactive) et l'analyse des modes de défaillance et de leurs effets (proactive), pour établir les raisons possibles des événements indésirables et des accidents évités de justesse. Afin d'obtenir une perspective plus large, il peut aussi s'avérer utile d'examiner un groupe de cas connexes ou de processus hospitaliers ou institutionnels. Les tendances peuvent être relevées par la collecte et l'analyse de données regroupées; un regroupement qui doit être fait sans toutefois donner de l'information identifiant le patient ou le professionnel de la santé.

Lors de l'évaluation des facteurs du système dans le cas d'un patient, ou d'un groupe de cas semblables, les questions suivantes peuvent être étudiées :

  • Quelles sont les raisons des résultats obtenus, des événements indésirables ou des accidents évités de justesse?
  • Les politiques pertinentes en place étaient-elles claires, réalistes, connues et disponibles?
  • Les lignes directrices cliniques en place et des plans de soins à jour étaient-ils utilisés dans le système?
  • Y avait-il des problèmes d'accès aux soins et de disponibilité des ressources?
  • Les diagnostics appropriés étaient-ils disponibles, et leur interprétation a-t-elle été facilitée?
  • L'équipe de soins avait-elle une formation appropriée? Y avait-il des problèmes de communication entre les membres de l'équipe?
  • Y a-t-il des recommandations concernant des changements à apporter au système, et a-t-on établi qui serait responsable de leur mise en œuvre?

Biais rétrospectif

Le fait de savoir qu'un résultat défavorable s'est
produit augmente la croyance qu'il était prévisible
et, par conséquent, évitable. Il s'agit d'un « biais
rétrospectif », et son existence est bien prouvée
dans de nombreux domaines, dont la médecine et
la psychologie.2 Ce biais rend plus facile de croire
qu'un résultat imprévu est lié à de mauvais soins
cliniques, plutôt que d'envisager le contexte ou le
milieu de travail où le professionnel de la santé
évoluait au moment de l'événement.

Dans la mesure du possible, il faut utiliser des stratégies pour reconnaître et réduire le biais rétrospectif dans l'évaluation des résultats imprévus et des événements indésirables.

Que fait-on si des problèmes de conduite sont révélés pendant une évaluation en matière d'amélioration de la qualité?

Si de graves préoccupations quant à la conduite ou au rendement d'un professionnel de la santé sont découvertes au cours de l'évaluation en matière d'amélioration de la qualité, le comité d'amélioration de la qualité doit arrêter son analyse de sorte que cette question puisse être examinée de façon appropriée dans le cadre d'un processus de responsabilisation distinct et indépendant.

Comment l'évaluation doit-elle être documentée?

L'information recueillie pour les évaluations en matière d'amélioration de la qualité doit être traitée de manière confidentielle, et son accès direct, limité aux personnes participant au processus d'évaluation. Lorsque cela est possible, il peut s'avérer utile d'employer des en-têtes ou des bas de page pour indiquer que le document servira à une évaluation en matière d'amélioration de la qualité conformément aux lois pertinentes. Les documents de travail doivent être conservés seulement pour la durée dont en a besoin le comité pour produire son rapport ou pour satisfaire aux exigences établies par la loi, après quoi cette information devrait être éliminée comme il se doit. Dans la mesure du possible, le rapport final ne doit pas nommer les personnes et doit éviter l'utilisation d'information permettant d'identifier les personnes en question.

La documentation liée à l'évaluation sera-t-elle protégée?

Pour favoriser une amélioration continue de la qualité et inciter la participation des professionnels de la santé, des lois dans chaque province ou territoire empêchent en général l'information et les documents servant au comité d'amélioration de la qualité ou produits par celui-ci d'être utilisés subséquemment dans des procédures judiciaires, réglementaires ou autres. Ces lois ne protègent pas le fait qu'une évaluation a été menée. La mesure dans laquelle les renseignements sur l'amélioration de la qualité peuvent être divulgués varie d'une province ou d'un territoire à l'autre.3

Selon la loi provinciale ou territoriale applicable, un comité d'amélioration de la qualité peut être en mesure de déléguer des fonctions à un sous-comité. Afin que cette protection s'étende aux travaux d'un sous-comité, ce dernier doit se conformer aux exigences de la loi en ce qui a trait à la constitution appropriée d'un comité d'amélioration de la qualité. Les fonctions déléguées à un sous-comité structuré de manière appropriée peuvent comprendre, sans toutefois s'y limiter, l'évaluation des rapports d'incident/accident, les investigations d'incidents critiques, la révision des dossiers, les vérifications des soins, les revues de morbidité et mortalité (RMM), les évaluations d'utilisation des ressources et les vérifications d'échantillons de tissus.

Point important pour les membres : Dans la plupart des provinces et territoires, les lois qui empêchent la divulgation des dossiers et des renseignements sur l'amélioration de la qualité dans les actions en justice s'appliquent aussi à d'autres procédures telles que les enquêtes des organismes de réglementation (Collèges). Toutefois, ces lois n'interdisent pas en général aux hôpitaux/établissements de signaler au Collège toute incompétence ou inconduite relevée par le processus d'amélioration de la qualité.4

Que doit-on faire des conclusions de l'évaluation?

Les conclusions de l'évaluation devraient en général être globales et peuvent confirmer que le résultat clinique imprévu découlait de la condition médicale sous jacente du patient ou des risques inhérents à l'investigation ou au traitement. Par contre, l'évaluation peut relever des faiblesses ou des défaillances du système qui peuvent être résolues à l'aide de mesures d'amélioration de la qualité.

Les conclusions de l'évaluation, y compris les recommandations sur les modifications à apporter en matière d'amélioration de la qualité, doivent être communiquées à la direction ou à la gestion. Les lois dans certaines provinces ou certains territoires interdisent explicitement la communication des résultats, des conclusions ou des recommandations d'un comité d'amélioration de la qualité à toute personne autre qu'aux membres de la direction ou de la gestion. Les renseignements sur l'amélioration de la qualité ne doivent pas renfermer de noms ou d'autres identificateurs personnels. L'information transmise à la direction ou à la gestion à partir d'une évaluation en matière d'amélioration de la qualité devrait être limitée à ce qui suit :

  • les nouveaux faits, le cas échéant, liés aux soins prodigués au patient qui ont été relevés au cours de l'évaluation et qui ne figurent pas encore au dossier médical du patient;
  • les conclusions finales sur les raisons d'un résultat imprévu, d'un événement indésirable ou d'une série d'événements, en mettant l'accent sur les éléments du système qui y ont contribué; et
  • les recommandations du comité sur la manière d'améliorer le système de soins.

Il incombe à la direction ou à la gestion d'établir la priorité des recommandations et de mettre en œuvre les changements appropriés. Qui plus est, la direction ou la gestion peut aussi avoir la responsabilité de communiquer les résultats et les recommandations à une régie de la santé ou à un organisme réglementaire approprié.

Comment les résultats de l'évaluation doivent-ils être communiqués aux patients et à leurs familles?

Pour préserver l'équité et l'objectivité du processus, le comité d'amélioration de la qualité ne devrait pas être chargé de divulguer les faits et les recommandations directement à un patient (étape de la divulgation subséquente).

Il incombe à la direction ou à la gestion de décider, au cas par cas et de préférence en consultation avec les conseillers juridiques et les professionnels de la santé impliqués, quels renseignements devraient être divulgués à un patient et par qui. Dans de nombreux cas, la direction ou la gestion participera probablement à la divulgation subséquente aux patients et à leurs familles. Selon les circonstances, les professionnels de la santé devraient tout de même se voir offrir la possibilité, avec le consentement du patient, de participer à ces discussions.

Un patient devrait être informé des nouveaux faits relevés par l'analyse de l'événement et des conclusions (mais pas des opinions menant aux conclusions) concernant les raisons de l'obtention du résultat clinique. L'évaluation peut confirmer que le résultat clinique découle de la condition médicale sous-jacente du patient ou des risques inhérents à l'investigation ou au traitement. Par contre, l'évaluation peut avoir constaté des faiblesses ou des défaillances du système. Les hypothèses formulées ne sont pas fournies, et le blâme est évité. Des excuses peuvent être de mise.5 Naturellement, les patients veulent souvent savoir quelles mesures ont été mises en œuvre pour éviter que d'autres personnes subissent un préjudice semblable. Dans certains cas, il peut convenir de communiquer au patient les changements ou les améliorations qui ont été apportés au système par l'hôpital ou l'établissement à la suite de l'évaluation en matière d'amélioration de la qualité.

Comment les « leçons à retenir » devraient-elles être partagées avec les autres professionnels de la santé?

Il peut s'avérer utile d'utiliser les recommandations issues de l'évaluation pour sensibiliser les autres professionnels de la santé et les résidents. Dans de telles circonstances, l'information permettant d'identifier le patient et les professionnels de la santé impliqués dans un événement ne devrait pas être divulguée. Bien qu'il soit raisonnable de communiquer toute amélioration apportée à la suite d'une évaluation en matière d'amélioration de la qualité, il ne serait pas approprié de révéler de l'information permettant de faire facilement le lien avec un événement donné.

Les évaluations de l'acte médical dans les hôpitaux et les établissements de santé

Une évaluation de l'acte médical met l'accent sur la conduite ou le rendement d'un professionnel de la santé, sans toutefois écarter l'identification de défaillances du système et d'améliorations à apporter. Ce type d'évaluation survient en général lorsqu'un professionnel de la santé pourrait être la cause principale d'un événement indésirable.

Quelle est la structure d'une évaluation de l'acte médical?

La structure d'une évaluation de l'acte médical est habituellement prévue dans les règlements et les politiques des hôpitaux et des établissements de santé; elle peut aussi être définie dans une loi. Le processus peut compter un certain nombre d'étapes, notamment les droits d'appel ou d'évaluation. Il importe que de telles évaluations soient menées de manière équitable pour toutes les parties en cause, et que les lois, les politiques ou les règlements pertinents soient respectés.

Qui procède à l'évaluation?

La direction et la gestion du service du professionnel de la santé sont habituellement chargées de l'évaluation. Leur rôle consiste à veiller, pendant l'évaluation, au traitement équitable de toutes les parties et au respect de l'ensemble des règlements, des politiques et des lois applicables.

Quand devrait se dérouler l'évaluation?

L'évaluation devrait être effectuée dès que possible. Ceci permet un meilleur souvenir des faits et la prise de mesures rapide pour régler les défaillances du système relevées.

Qui devraient participer à l'évaluation?

Les règlements et/ou les politiques des hôpitaux et des établissements de santé obligent habituellement le professionnel de la santé à collaborer à une évaluation de l'acte médical. Les patients, les décideurs remplaçants et des membres de la famille désignés peuvent se voir demander de contribuer à l'évaluation en fournissant leur connaissance des faits. Les participants peuvent aussi inclure d'autres professionnels de la santé impliqués dans les soins du patient. À l'occasion, des experts indépendants peuvent participer à une évaluation de l'acte médical.

Les participants au processus d'évaluation de l'acte médical devraient limiter leurs commentaires aux faits dont ils ont une connaissance directe. Ils doivent répondre aux questions par des faits et ne pas formuler d'hypothèses, se blâmer ou blâmer les autres.

Biais rétrospectif

Le fait de savoir qu'un résultat défavorable s'est produit augmente la croyance qu'il était prévisible et, par conséquent, évitable. Il s'agit d'un « biais rétrospectif », et son existence est bien prouvée dans de nombreux domaines, dont la médecine et la psychologie. Ce biais rend plus facile de croire qu'un résultat imprévu est lié à de mauvais soins cliniques, plutôt que d'envisager le contexte ou le milieu de travail où le professionnel de la santé évoluait au moment de l'événement.

Comment l'information est-elle analysée?

Une évaluation de l'acte médical peut ou non relever ou confirmer des problèmes au sujet de la compétence ou de la conduite d'un professionnel de la santé. Au cours d'une évaluation de l'acte médical, le défi consiste à comprendre la vraisemblance d'une décision prise par un professionnel de la santé au moment de l'événement indésirable, en prenant en considération toutes les circonstances du milieu de travail.6

Parfois, au cours d'une évaluation de l'acte médical, des problèmes liés au système sont aussi relevés et doivent être dirigés vers le comité d'amélioration de la qualité.

La documentation liée à l'évaluation sera-t-elle protégée?

L'information produite lors d'une évaluation de l'acte médical n'est pas recueillie pour un comité d'amélioration de la qualité, ni issue de ce dernier; par conséquent, elle n'est pas protégée par les lois sur l'amélioration de la qualité. Le processus et les dossiers d'une telle évaluation devraient néanmoins être traités sous le sceau de la confidentialité. Les participants à une évaluation de l'acte médical doivent être informés de la nature de l'évaluation et de la mesure dans laquelle l'information produite sera communiquée à d'autres personnes et dans quelles circonstances.

Point important pour les membres : L'information produite dans le cadre d'une évaluation de l'acte médical n'est pas protégée par les lois sur l'amélioration de la qualité. Les membres participant à une telle évaluation devraient s'informer dans quelle mesure l'information produite sera communiquée et dans quelles circonstances.

Que doit-on faire des conclusions de l'évaluation?

Tel que mentionné précédemment, une évaluation de l'acte médical ne relève pas nécessairement des problèmes sur la conduite ou le rendement d'un professionnel de la santé. Toutefois, si de tels problèmes sont relevés, les organisations sont invitées à envisager l'adoption d'une approche favorisant la prise de mesures correctives appropriées et de perfectionnement professionnel continu. Des sanctions disciplinaires ou autres sanctions ne devraient être prises qu'en cas de nécessité seulement.

Point important pour les membres : Si les privilèges d'un membre sont restreints, annulés ou suspendus à la suite d'une évaluation, peu importe sa nature, l'hôpital ou l'établissement de santé peut avoir l'obligation légale de communiquer cette information au Collège.7

Comment les résultats de l'évaluation doivent-ils être communiqués aux patients et à leurs familles?

Lorsqu'une évaluation de l'acte médical a eu lieu, il convient de rassurer le patient que l'événement a été examiné à fond et que des mesures appropriées ont été prises. Il revient à la direction ou à la gestion de décider, au cas par cas, si d'autres renseignements doivent être divulgués aux patients et à leurs familles. Malgré la demande d'un patient d'obtenir d'autres renseignements, le droit à la vie privée du professionnel de la santé doit être respecté. À titre d'exemple, il ne conviendrait pas que la direction ou la gestion divulgue de l'information sur la santé d'un professionnel de la santé sans le consentement de ce dernier. La décision de communiquer les résultats de l'évaluation avec les patients et leurs familles nécessitera habituellement la consultation du conseiller juridique de l'hôpital ou de l'établissement de santé.

Choisir le meilleur type d'évaluation

Avant de déterminer le type d'évaluation à entamer, il faut établir la pertinence et les avantages d'un processus d'évaluation. L'évaluation initiale repose sur la collecte de faits préliminaires du résultat clinique imprévu, de l'événement indésirable ou de l'accident évité de justesse. Un examen des faits saillants aidera à déterminer si une analyse plus poussée est nécessaire. Si tel est le cas, la prochaine étape consiste à choisir le type d'évaluation à effectuer.

Étape 1 : Recueillir tous les faits

Pour déterminer si une évaluation est indiquée8, il faut procéder à une collecte préliminaire de faits saillants. Elle aidera à se faire une première idée de l'événement et à déterminer si une évaluation sera avantageuse.

Étape 2 : Déterminer si une analyse/évaluation additionnelle est nécessaire

En général, une évaluation devrait être considérée lorsque survient un grave résultat clinique imprévu ou un événement indésirable. Le cadre juridique dans chaque province ou territoire peut dicter quels genres d'événements (p. ex., incidents critiques) requièrent une évaluation officielle. Une évaluation en matière d'amélioration de la qualité devrait aussi être envisagée pour les résultats cliniques moins graves, les accidents évités de justesse et, au cas par cas, les préoccupations ou plaintes formulées par des patients ou des professionnels de la santé et qui sont associées à un résultat imprévu et/ou un événement indésirable.

Chaque hôpital ou établissement de santé doit décider, de préférence à l'aide de critères et d'objectifs pré-établis, quels événements doivent être évalués, le type d'évaluation et l'ampleur de l'analyse.

Bien que la plupart des événements indésirables soient liés aux risques inhérents à une investigation ou à un traitement, le préjudice ne devrait pas être prématurément attribué à une simple « complication » de l'investigation ou du traitement. L'examen de certains de ces événements doit être envisagé pour déterminer si des problèmes du système étaient des facteurs contributifs.

Étape 3 : Déterminer quel type d'évaluation doit être amorcé

Reconnaissant que les événements indésirables découlent souvent de défaillances du système, les évaluations en matière d'amélioration de la qualité représentent l'option de prédilection. Selon la théorie de la sécurité du patient, le fait de mettre l'accent sur le système plutôt que sur une seule personne permettra d'éviter un plus grand nombre d'événements indésirables. Toutefois, une évaluation de l'acte médical doit être prise en considération lorsque la conduite d'un professionnel de la santé semble être le facteur prédominant qui a contribué à l'événement indésirable ou à l'accident évité de justesse.

Les trois questions suivantes aideront la direction à déterminer s'il convient de procéder à une évaluation de l'acte médical :

  • Y a-t-il allégation de violation délibérée d'une politique valable de la part d'un professionnel de la santé?
  • Y a-t-il une inquiétude au sujet de la santé d'un professionnel de la santé?
  • Reconnaissant les différences entre les points d'intérêt et les objectifs d'une évaluation en matière d'amélioration de la qualité et d'une évaluation de l'acte médical, il peut s'avérer nécessaire à l'occasion de procéder aux deux évaluations. Elles doivent être effectuées indépendamment l'une de l'autre avec un coupe-feu de l'information stricte entre les deux.

    La principale préoccupation dans le cas en question a-t-elle trait à un manque flagrant de connaissances ou de compétences ou à une importante inconduite chez un professionnel de la santé? (Note : dans ce contexte, une conduite non professionnelle fait seulement référence à un comportement qui peut avoir grandement contribué à l'événement indésirable ou à l'accident évité de justesse.)

À moins d'obtenir une réponse positive à l'une de ces questions, une évaluation en matière d'amélioration de la qualité est l'approche la plus indiquée, reconnaissant qu'elle détermine efficacement les améliorations à apporter au système.

L'importance d'un « coupe-feu » de l'information

Il peut parfois s'avérer nécessaire d'entamer deux processus d'évaluation : une évaluation en matière d'amélioration de la qualité et une évaluation de l'acte médical. Les deux évaluations doivent être effectuées de façon distincte et séparées par un « coupe-feu » de l'information. En séparant ces deux processus, les professionnels de la santé participant à l'évaluation en matière d'amélioration de la qualité seront probablement plus enclins à donner leurs opinions et à faire valoir leurs points de vue sur les améliorations pouvant être apportées au système.

Point important pour les membres : Les membres de l'ACPM devraient communiquer avec l'Association pour obtenir des conseils dans les cas suivants :

  • On les oblige à participer à une évaluation en matière d'amélioration de la qualité dont la structure ne répond pas aux paramètres établis dans la loi provinciale ou territoriale pertinente;
  • Leurs privilèges sont menacés;
  • Un coroner ou un médecin légiste demande de l'information issue d'une évaluation, ou des procédures disciplinaires risquent d'être entamées ou ont été entamées par un Collège;
  • Ils ne sont pas certains comment procéder.

Le processus de triage

L'utilisation d'un processus de triage aidera à déterminer si une évaluation sera avantageuse et, le cas échéant, quel type d'évaluation est nécessaire. Le triage d'information doit être effectué de manière objective par des dirigeants qui ont des connaissances dans la pratique médicale et en sécurité des patients, et qui comprennent les objectifs distincts des deux types d'évaluation.

Le diagramme qui suit (figure 1) illustre le processus de triage suggéré pour les résultats imprévus, les événements indésirables et les accidents évités de justesse, ainsi que pour les deux types d'évaluations généralement possibles dans les hôpitaux et les établissements de santé.

Figure 1 : Choisir le meilleur type d'évaluation dans les hôpitaux et les établissements de santé

Résultat clinique imprévu, événement indésirable ou accident évité de justesse

Triage d'un événement

Étape 1 – Collecte préliminaire des faits

  • Le triage est effectué par des membres de la direction ayant des connaissances cliniques

Étape 2 – Déterminer si une analyse plus poussée est nécessaire

  • Selon des critères objectifs (peuvent être définis par la loi dans certaines provinces ou certains territoires)
  • Les événements indésirables ne requièrent pas tous une analyse plus poussée (une divulgation aux patients doit quand même être faite)

Étape 3 – Si une analyse plus poussée est nécessaire, choisir le type approprié d'évaluation à l'aide des questions suivantes :

  • Y a-t-il allégation de violation délibérée d'une politique valable de la part d'un professionnel de la santé?
  • Y a-t-il des inquiétudes quant à la santé d'un professionnel de la santé?
  • La principale préoccupation dans le cas en question a-t-elle trait à un manque flagrant de connaissances ou de compétences ou à une importante inconduite chez un professionnel de la santé?

NON à toutes les questions

Évaluation en matière d'amélioration de la qualité par le comité ou sous-comité d'amélioration de la qualité
Accent mis sur les défaillances du système (contexte des soins)

Des problèmes de responsabilisation ont-ils été relevés pour un professionnel de la santé?
Si d'importantes préoccupations ont été soulevées au sujet de la compétence d'un professionnel de la santé, il faut alors arrêter l'évaluation et la rediriger sans donner de détails vers la démarche d'évaluation de l'acte médical.

Résultat attendu :
Recommandations possibles de modifications au système afin d'offrir de meilleurs soins au patient. Perfectionnement professionnel continu de tous les professionnels de la santé.

OUI à une question

Évaluation de l'acte médical du professionnel de la santé par la direction/gestion
Accent mis sur la conduite du professionnel de la santé. Doit être effectuée lorsqu'il y a des préoccupations au sujet de la conduite du professionnel en fonction des questions de triage susmentionnées

Des problèmes liés au système ont-ils été relevés?
Si des problèmes liés au système sont relevés, considérer soumettre aussi le cas à une évaluation en matière d'amélioration de la qualité

Résultat attendu pour le professionnel de la santé :
Réponse graduelle de soutien, possibilité de formation ciblée, parfois des sanctions.

 

Favoriser une culture juste en matière de sécurité

Les patients et les professionnels de la santé bénéficieront grandement d'un milieu de soins de santé qui favorise une culture juste en matière de sécurité. Dans un tel milieu, les professionnels de la santé et les membres de la direction/gestion ont le même engagement envers l'utilisation de processus d'amélioration de la qualité empreints d'équité et de confiance.

Les éléments d'une culture en matière de sécurité des patients

Une culture en matière de sécurité est une culture qui met en évidence un engagement dans l'ensemble de l'organisation visant à offrir les soins les plus sécuritaires possibles aux patients. Ainsi, la sécurité est une valeur fondamentale. Dans ces organisations, la direction suscite les améliorations en matière de sécurité en fournissant les ressources nécessaires pour atteindre les résultats voulus.

De plus, les organisations qui adoptent une culture juste en matière de sécurité offrent un soutien à leurs professionnels de la santé en s'assurant que ces derniers puissent déclarer les événements indésirables sans craindre d'être réprimandés ou punis de façon inappropriée. Ils sont plutôt félicités d'avoir fourni l'information nécessaire pour aider les organisations à apporter des améliorations. Sans une culture empreinte de confiance et de respect, un professionnel de la santé pourrait axer ses efforts sur la dissimulation et la défense9 plutôt que sur les leçons à retenir des événements.

 

Une culture juste en matière de sécurité :

 

Une démarche en soins de santé où offrir des soins de santé sécuritaires est une valeur fondamentale de l'organisation. La culture encourage et développe les connaissances, les compétences et l'engagement de l'ensemble des dirigeants, des gestionnaires, des professionnels de la santé, du personnel et des patients en vue de prodiguer des soins sécuritaires. Les occasions d'améliorer proactivement la sécurité des soins sont constamment relevées et des mesures sont prises pour y donner suite. Les professionnels de la santé et les patients reçoivent un soutien approprié et adéquat dans la quête de soins sécuritaires. La culture favorise l'apprentissage à partir des événements indésirables et des accidents évités de justesse pour renforcer le système, et, au besoin, soutient et sensibilise les professionnels de la santé et les patients pour aider à éviter que des événements semblables se reproduisent. Il y a un engagement commun dans l'ensemble de l'organisation concernant la mise en œuvre d'améliorations et le partage des leçons à retenir. La justice constitue un élément important. Tous les intervenants sont conscients des attentes, et, dans l'analyse des événements indésirables, toute responsabilisation professionnelle des professionnels de la santé est établie de manière équitable. Les intérêts des patients et des professionnels de la santé sont protégés.

L'utilisation du terme « juste » renvoie à un système équitable et favorable. Les éléments suivants sont importants10 :

  • Les raisons des résultats cliniques et des événements ne sont pas préjugées, et le blâme hâtif des individus est évité. Il y a plutôt une tentative de comprendre les circonstances et le contexte des mesures et des décisions prises au moment de l'événement. L'analyse se concentre principalement sur les défaillances du système afin de les relever et, dans la mesure du possible, les corriger.
  • L'organisation accepte une responsabilité appropriée. Les personnes ne sont pas tenues responsables des défaillances du système sur lesquelles elles ont peu ou pas de contrôle.
  • Les professionnels de la santé peuvent avoir confiance que les premières réactions à un événement indésirable, ainsi que toutes les analyses et les procédures subséquentes, seront menées avec équité, dans les limites des cadres législatifs et légaux, et conformément aux politiques et/ou aux règlements établis de l'hôpital. Les droits de tous les individus, y compris ceux des patients, sont protégés.
  • Les politiques et les procédures pertinentes qui favorisent l'amélioration de la qualité sont comprises des professionnels de la santé et suivies par la direction/gestion.
  • Les professionnels de la santé ont confiance dans la réponse de l'organisation à un événement indésirable, laquelle empêche de manière appropriée que les renseignements sur l'amélioration de la qualité soient utilisés dans ces procédures juridiques, réglementaires ou autres.
  • L'organisation ne tolère pas les gestes non sécuritaires posés intentionnellement, ni les gestes insouciants, l'indifférence envers le mieux-être des patients ou du personnel, ou tout autre inconduite volontaire.
  • Il y a une compréhension commune de la différence entre un acte répréhensible et un acte qui ne l'est pas11.
  • La divulgation des événements indésirables aux patients est importante. Les patients reçoivent de l'information factuelle sur les événements indésirables.
  • Les professionnels de la santé sont appuyés, protégés et sensibilisés de manière appropriée.

Conclusion

L'identification et la déclaration des événements indésirables représentent une pierre angulaire de la sécurité des patients contemporaine et un élément essentiel à l'amélioration de la qualité des soins.

Des évaluations en matière d'amélioration de la qualité bien structurées constituent une façon importante d'encourager les professionnels de la santé à évaluer et à améliorer le système de santé. Ces évaluations et la mise en œuvre des recommandations qui en découlent sont considérées comme l'une des méthodes les plus efficaces pour relever les occasions d'optimiser les leçons à retenir des événements indésirables, et au bout du compte d'éviter de futurs préjudices pour les patients.

Points importants pour les membres participant aux déclarations et aux évaluations :

  • Connaître et suivre les politiques et les procédures concernant la déclaration des événements indésirables et les accidents évités de justesse.
  • Fournir uniquement de l'information factuelle dans les rapports d'incident/accident et s'abstenir de jeter un blâme ou de formuler des hypothèses, des opinions ou autres commentaires sur les raisons de l'événement.
  • S'informer afin de savoir si le comité d'amélioration de la qualité de l'établissement est bien constitué en vertu de la loi pertinente et obtenir l'assurance que les évaluations en matière d'amélioration de la qualité seront menées sous le sceau de la confidentialité.
  • Participer pleinement aux évaluations en matière d'amélioration de la qualité axées sur les systèmes.
  • Comprendre les différences entre une évaluation en matière d'amélioration de la qualité et une évaluation de l'acte médical, en ce qui a trait à leur but, leurs procédures, les protections de l'information et les conséquences.
  • En cas d'incertitude, communiquer avec l'ACPM pour obtenir des conseils.

 

Points importants pour les membres jouant un rôle dans la direction/gestion des hôpitaux/établissements de santé :

  • Envisager l'élaboration de politiques et de procédures pour favoriser l'amélioration de la qualité, notamment la déclaration des événements indésirables et des accidents évités de justesse, et veiller à ce qu'elles soient bien comprises par les professionnels de la santé et suivies par la direction/gestion.
  • Promouvoir la mise en œuvre de politiques et de procédures qui séparent les évaluations en matière d'amélioration de la qualité axées sur les systèmes et les évaluations de l'acte médical; les premières favorisant la sécurité des patients, les deuxièmes se concentrant sur les gestes posés par les professionnels de la santé.
  • Accepter la responsabilité appropriée. Les personnes ne devraient pas être tenues responsables des défaillances du système sur lesquelles elles ont peu ou pas de contrôle.
  • Lorsque les lois de la province ou du territoire l'autorisent, établir des procédures pour diffuser les recommandations issues des évaluations en matière d'amélioration de la qualité pour améliorer le système tout en veillant à la protection des autres renseignements recueillis pendant le processus d'évaluation.
  • Formuler des recommandations et mettre en œuvre des changements au système à la lumière des résultats des processus d'amélioration de la qualité.

En s'appuyant sur la croyance que les processus d'amélioration de la qualité mènent à de meilleurs résultats cliniques, l'ACPM continue de travailler avec d'autres intervenants à l'amélioration de la sécurité des patients au Canada.


Glossaire

À des fins d'uniformité, l'ACPM préconise l'utilisation des définitions suivantes :

Analyse des causes souches (ACS) Outil qui peut être utilisé pour effectuer une analyse complète et systémique des événements sentinelles (incidents critiques). Cela inclut l'identification des causes profondes ou causes souches et des facteurs contributifs, des stratégies visant la réduction des risques et l'élaboration des plans d'action de même que des outils et des méthodes pouvant évaluer l'efficacité desdits plans.
(Hoffman, C., Beard P., Greenall, J. U, D. et White, J. (2006). Guide canadien des causes souches à l'usage des francophones du Canada et adapté pour le Québec. Edmonton (Alberta); Institut canadien pour la sécurité des patients)
Analyse des modes de défaillances et de
leurs effets

Dans le contexte de la sécurité des patients, analyse des composantes d'un système ou étapes d'un processus dans la prestation des soins avant que ne se produisent des événements indésirables (proactivement) dans le but de déterminer la probabilité et les effets d'une défaillance d'une composante ou d'une étape. (ACPM)

Biais rétrospectif Le fait de savoir qu'un résultat défavorable s'est produit augmente la croyance qu'il était prévisible, qu'il aurait dû être anticipé et que, par conséquent, il était évitable. (ACPM)
Compétence Posséder les connaissances et les habiletés pour exercer conformément à la norme de diligence généralement reconnue. (ACPM)
Culture juste en matière de sécurité

Démarche en soins de santé où offrir des soins de santé sécuritaires est une valeur fondamentale de l'organisation. La culture encourage et développe les connaissances, les compétences et l'engagement de l'ensemble des dirigeants, des gestionnaires, des professionnels de la santé, du personnel et des patients en vue d'offrir des soins sécuritaires. Les occasions d'améliorer proactivement la sécurité des soins sont constamment relevées et des mesures sont prises pour y donner suite. Les professionnels de la santé et les patients reçoivent un soutien approprié et adéquat dans la quête de soins sécuritaires. La culture favorise l'apprentissage à partir des événements indésirables et des accidents évités de justesse pour renforcer le système, et, au besoin, soutient et sensibilise les professionnels de la santé et les patients pour aider à éviter que des événements semblables se reproduisent. Il y a un engagement commun dans l'ensemble de l'organisation concernant la mise en œuvre d'améliorations et le partage des leçons à retenir. La justice constitue un élément important. Tous les intervenants sont conscients des attentes, et, dans l'analyse des événements indésirables, toute responsabilisation professionnelle des professionnels de la santé est établie de manière équitable. Les intérêts des patients et des professionnels de la santé sont protégés. (ACPM)

Décideur remplaçant

Personne autre que le patient qui est légalement autorisée à prendre des décisions au nom du patient. Cette autorisation peut être accordée par le patient lui-même au moyen d'un document juridique comme une directive préalable, par une loi ou par les tribunaux. (ACPM)

Déclaration Communication par des prestataires de soins de santé sur un événement indésirable ou un accident évité de justesse par les canaux appropriés, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des établissements de soins de santé, afin de réduire le risque que cet événement ne se reproduise.
(Groupe de travail national sur la divulgation des événements indésirables. Lignes directrices canadiennes relatives à la divulgation des événements indésirables, Alberta; Institut canadien pour la sécurité des patients; 2008)
Défaillance du système Échec ou mauvais fonctionnement des politiques, des méthodes opérationnelles ou de l'infrastructure d'appui à la prestation des soins de santé, ou absence de celles-ci. (ACPM)
Divulgation

Communication au patient de renseignements concernant un événement indésirable par des professionnels de la santé.
(Groupe de travail national sur la divulgation des événements indésirables. Lignes directrices canadiennes relatives à la divulgation des événements indésirables, Alberta; Institut canadien pour la sécurité des patients; 2008)

Divulgation initiale : Discussion initiale avec le patient, laquelle doit se faire à la première occasion pratique après un événement indésirable et où l'accent est mis sur les faits connus et la prestation d'autres soins cliniques.

Divulgation subséquente : Discussions subséquentes avec le patient au sujet des faits connus sur les causes du préjudice après l'analyse appropriée de l'événement indésirable.

Équité procédurale Concept juridique selon lequel les procédures administratives devraient être effectuées de manière équitable pour toutes les parties en cause. Bien que l'étendue de l'équité varie selon la nature des procédures, les parties en cause doivent au moins avoir une juste possibilité de participer aux procédures. Cela inclut de donner aux parties un préavis de la tenue des procédures et la capacité de répondre à tout argument ou élément de preuve préjudiciable.
Erreur (médicale) du professionnel de la santé

Acte (plan, décision, choix, action ou inaction) qui en rétrospective n'était pas approprié et qui a causé un événement indésirable ou un accident évité de justesse. (ACPM)

L'utilisation du terme « erreur » devrait en général être évitée, particulièrement avant de connaître tous les faits, puisque cela peut laisser sous-entendre à tort que le professionnel de la santé a eu une conduite répréhensible. Le terme peut porter à confusion et laisser supposer que les soins prodigués ne répondaient pas aux normes ou correspondaient à une faute médicale en regard de la loi. Les erreurs peuvent ou non être le résultat d'une faute médicale.

Les médecins n'ont pas nécessairement manqué à leur devoir envers un patient simplement parce qu'ils ont commis une erreur de jugement après avoir effectué un examen minutieux et une analyse attentive de l'état d'un patient. Des erreurs de jugement peuvent survenir, à titre d'exemple, lors du diagnostic ou du choix entre diverses approches thérapeutiques.

Évaluation en matière d'amélioration de la qualité

Analyse par des organisations de la santé (habituellement par un comité d'amélioration de la qualité) des résultats obtenus chez les patients, des pratiques cliniques et des systèmes de santé dans le but de recommander des améliorations à apporter. (ACPM)

Les comités d'amélioration de la qualité, dans le cadre d'un programme visant à améliorer les soins des patients, doivent être structurés conformément aux lois provinciales ou territoriales pertinentes et avoir un mandat officiel. Selon la province ou le territoire, les comités d'amélioration de la qualité peuvent porter différents noms, notamment : comité de la qualité des soins, comité d'examen des incidents critiques ou comité de gestion des risques.

Évaluation par les pairs

Évaluation rétrospective effectuée par les pairs, ou des experts du domaine, d'une personne donnée ou d'un groupe de personnes se penchant sur des indicateurs précis de la qualité des soins. Le but consiste à identifier, dans le cadre d'un processus confidentiel, les secteurs de pratique à améliorer. Dans certaines conditions, une évaluation par les pairs peut être faite pour évaluer les compétences cliniques d'une personne. (ACPM)

Événement indésirable

Événement involontaire dans la prestation des services de soins de santé qui entraîne un préjudice et qui n'est pas attribuable à une complication reconnue.
(Groupe de travail national sur la divulgation des événements indésirables. Lignes directrices canadiennes relatives à la divulgation des événements indésirables, Alberta; Institut canadien pour la sécurité des patients; 2008)

Autres événements non intentionnels :

  • Événement à risque de préjudice
    L'événement a atteint le patient (physiquement de façon externe ou interne) et aucun préjudice n'a été causé à ce moment; par contre, il pourrait y avoir un risque de préjudice dans le futur.
  • Événement sans risque de préjudice
    L'événement a atteint le patient et aucun préjudice n'a été causé à ce moment; il n'y a en réalité aucun risque de préjudice dans le futur.
  • Accident évité de justesse
    L'événement n'a pas atteint le patient en raison d'une intervention opportune ou de la chance.
Incident critique Incident causant un préjudice grave (décès, perte d'un membre ou d'un organe vital) chez le patient, ou risque important de subir ce préjudice. Un incident est considéré critique lorsqu'il nécessite une investigation ou une réponse immédiate.
(Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada, Dictionnaire canadien sur la sécurité des patients – la version française de ce dictionnaire n'a pas encore été publiée)
Négligence/faute

Concept juridique. Dans l'ensemble des provinces et des territoires du Canada, à l'exception du Québec, afin de pouvoir établir qu'il y a eu négligence de la part d'un médecin, un patient demandeur doit prouver, à la satisfaction de la cour, que le préjudice a été causé parce que le médecin ne s'est pas conformé à une norme de diligence raisonnable et acceptable. Afin de déterminer s'il y a eu négligence médicale, les tribunaux appliquent non pas une norme de diligence visant la perfection mais plutôt la norme de diligence qu'aurait utilisée un collègue dans des circonstances similaires.

Au Québec, la faute est un concept au cœur de la responsabilité civile. Toute personne a le devoir de se conformer à certaines règles ou normes de conduite. Si elle y manque, elle commet une faute. Le demandeur peut démontrer que le médecin a commis une faute, c'est-à-dire qu'il n'a pas agi de manière raisonnable et prudente comme l'aurait fait un médecin de formation et expérience semblables dans les mêmes circonstances. Le demandeur doit aussi avoir subi un préjudice à la suite de la faute et établir que cette faute a causé le préjudice. (ACPM)
(Pour plus d'information sur la négligence/faute, consulter la section de l'apprentissage en ligne de l'ACPM.)

Outil déclencheur Approche en matière de vérification rétrospective où certains événements (p. ex., réadmission à l'hôpital, données de laboratoire anormales, ou utilisation de certains médicaments) servent à titre d'indicateurs pour relever d'éventuels événements indésirables. (ACPM)
Préjudice

Résultat qui influe négativement sur la santé ou la qualité de vie d'un patient.
(Groupe de travail national sur la divulgation des événements indésirables. Lignes directrices canadiennes relatives à la divulgation des événements indésirables, Alberta; Institut canadien pour la sécurité des patients; 2008)

Privilège Exception à la règle générale des procédures au civil où l'ensemble des possessions, des pouvoirs et des mesures de réglementation d'une partie doit être divulgué à toutes les parties adverses. La loi sur les privilèges empêche la divulgation de certaines communications (écrites ou orales) dans des procédures juridiques. Une revendication de privilège est aussi reconnue comme étant une exception aux lois provinciales, territoriales et fédérales sur la protection de la vie privée selon lesquelles une personne a le droit général d'accéder à ses renseignements personnels. (ACPM)
Rapport d'incident/accident Rapport d'un événement indésirable ou d'un accident évité de justesse (d'autres termes peuvent parfois être utilisés pour le désigner comme rapport sur la sécurité du patient). L'information s'y trouvant pourrait ne pas être protégée de la divulgation. (ACPM)
Responsable Être responsable sur le plan professionnel. (ACPM)
Revue de morbidité et mortalité Activité d'amélioration de la qualité où les membres d'un service d'un hôpital ou établissement de santé évaluent les soins prodigués à un patient en particulier ou à un groupe de patients à des fins de formation ou de sensibilisation de tous les intervenants et formulent des recommandations pour améliorer les soins de tous les patients dans le futur. (ACPM)
Sécurité des patients Réduction et atténuation des effets des actes dangereux posés dans le système de santé et utilisation de pratiques exemplaires éprouvées comme produisant des résultats optimaux pour le patient.
(Frank, JR, Brien, S, (co-rédacteurs) au nom du Comité directeur sur les compétences liées à la sécurité des patients. Les compétences liées à la sécurité des patients – L'amélioration de la sécurité des patients dans les professions de la santé. Ottawa (Ontario); Institut canadien pour la sécurité des patients; 2008.)

Références

  1. À ce jour, le Québec et l'Ontario exigent qu'une copie du rapport d'incident ou d'accident soit conservée dans le dossier du patient de l'hôpital. Au Québec, un accident évité de justesse est appelé un « incident » et un événement indésirable un « accident ». En Ontario, le terme « incident critique » est employé, lequel correspond à un événement indésirable.
  2. Dekker, S. Just culture: balancing safety and accountability. Burlington, VT: Ashgate Publishing, Ltd.; 2007.
  3. Chaque province ou territoire au Canada a promulgué des lois qui empêchent les renseignements sur l'amélioration de la qualité d'être divulgués lors de procédures judiciaires. Toutefois, elles diffèrent dans la manière dont elles établissent ce que sont un comité d'amélioration de la qualité, une activité d'amélioration de la qualité et de l'information sur l'amélioration de la qualité. De plus, la mesure dans laquelle la protection est accordée à l'information sur l'amélioration de la qualité varie d'une province ou d'un territoire à l'autre. Les membres sont invités à se familiariser avec les lois pertinentes de leur province ou de leur territoire.
  4. L'exception est en Ontario, où la Loi de 2004 sur la protection des renseignements sur la qualité des soins interdit la divulgation des renseignements sur la qualité des soins au Collège.
  5. Voir Divulgation d’un préjudice résultant de la prestation des soins : Pour une communication ouverte et honnête avec les patients de l'ACPM.
  6. Dekker, S., op. cit., supra note 2.
  7. En Colombie-Britannique, en Alberta, en Ontario, au Québec, au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, à l'Île-du-Prince-Édouard et à Terre-Neuve-et-Labrador, des lois exigent la déclaration des mesures disciplinaires prises dans les hôpitaux.
  8. Le processus d'évaluation en matière d'amélioration de la qualité peut aussi servir à examiner d'autres groupes de résultats cliniques, non pas seulement ceux déclenchés par le résultat ou l'expérience d'un seul patient.
  9. Dekker, S., op. cit., supra note 2.
  10. Adaptation de Dekker, S., op. cit., supra note 2.
  11. Reason, J. Human error: models and management. BMJ. 2000;320:768-770.