■ Obligations et responsabilités :

Les attentes vis-à-vis des médecins

Protocoles de priorisation pendant la pandémie de COVID-19

Un médecin en profonde réflexion, qui regarde vers le bas en croisant les mains

5 minutes

Publié : juin 2020 /
Révisé : septembre 2021

Les renseignements présentés dans cet article étaient exacts au moment de la publication

Enjeux

  • Les protocoles de priorisation ont pour but d’appuyer la prise de décisions éclairées quant à l’affectation des ressources destinées aux patients atteints de la COVID-19. Ils prennent souvent la forme de protocoles d’affectation des ressources en soins intensifs.
  • L’affectation des ressources parmi les patients aux soins intensifs pendant la pandémie de COVID-19 peut engendrer une incertitude considérable chez les professionnels de la santé, ainsi qu’une détresse morale et éthique.
  • Les protocoles de priorisation peuvent aller à l’encontre du devoir de diligence qu’ont les médecins envers chacun de leurs patients et pourraient même donner lieu à des risques médico-légaux.

En bref

  • Les protocoles de priorisation constituent des mesures de dernier recours dont la mise en œuvre prendra fin, le cas échéant, en même temps que l’urgence de santé publique liée à la COVID-19.
  • Ces protocoles sont délibérément centrés sur des enjeux populationnels élargis, plutôt que sur les droits individuels des patients.
  • Communiquez avec l’ACPM pour obtenir des conseils précis quant à vos risques médico-légaux associés à un protocole de priorisation particulier.

Ce qu’il faut savoir

En quoi les protocoles de priorisation sont-ils utiles?

  • Les protocoles de priorisation peuvent assurer l’objectivité, l’uniformité et l’efficience des décisions en matière de gestion des ressources en soins intensifs. Ils servent de balises aidant à déterminer les patients qui recevront un traitement, le niveau de soins requis et les circonstances devant être présentes dans chaque cas.
  • Les responsables, les équipes ou les comités de priorisation à qui revient la mise en œuvre des protocoles de priorisation peuvent alléger une certaine partie du fardeau moral qui vous est imposé, vous permettant ainsi de mieux vous concentrer sur la prestation des meilleurs soins possibles aux patients. Par exemple, certains protocoles se penchent sur l’accessibilité de mesures de soutien, telles que des travailleurs sociaux et des lettres types à l’intention des patients et de leur famille, pour faciliter la communication des décisions de priorisation.
  • Certains protocoles établissent également un processus détaillé de résolution des conflits pouvant survenir entre les professionnels d’une équipe de soins, ainsi qu’entre les patients et les professionnels de la santé, au sujet des évaluations et des décisions de priorisation.

En quoi mes obligations sont-elles différentes en fonction des protocoles de priorisation?

  • Sachez que les protocoles de priorisation ont pour objectif premier de maximiser les avantages pour l’ensemble de la population, et qu’ils pourraient altérer le devoir de diligence que vous avez envers chacun de vos patients.
  • Respectez tous les protocoles de priorisation applicables et pertinents qui ont été établis par votre établissement de santé, ou par l’autorité en matière de santé, l’agence de la santé publique ou le gouvernement de votre province ou territoire. Dans un certain nombre de provinces et de territoires, de tels protocoles ont force de loi s’ils sont mis en œuvre en vertu d’une loi sur la gestion des urgences.
  • Dans vos dossiers, consignez de façon exhaustive ce que vous avez compris des protocoles de priorisation en vigueur, ainsi que les raisons pour lesquelles vous vous écartez d’un protocole établi ou décidez de ne pas l’appliquer lorsque cela s’avère nécessaire pour un patient particulier.
  • Communiquez de façon proactive avec les patients, leurs décideurs remplaçants et leur famille, le cas échéant, pour leur expliquer comment les protocoles de priorisation pourraient altérer la prestation de soins aux patients ainsi que l’application des directives préalables et autres volontés concernant les soins de fin de vie.
  • Appliquez les protocoles de priorisation de façon équitable et uniforme pour tous les patients présentant des pronostics similaires. Bien que l’objectif principal soit d’accorder la priorité à certains patients par rapport à d’autres, il est important de s’assurer qu’un motif de discrimination prohibé n’est pas à l’origine des décisions en matière de priorisation. Certains protocoles comptent des principes directeurs en matière de priorisation qui traitent particulièrement de la nécessité de proscrire la discrimination et de protéger les droits de la personne.

Qu’en est-il de la responsabilité lorsque l’on applique un protocole de priorisation?

  • Le retrait d’une ressource de soins intensifs sans le consentement du patient exposerait normalement les médecins à des risques de poursuites au civil ou au criminel et de mesures disciplinaires de la part des organismes de réglementation (Collèges). Or, les protocoles de priorisation pourraient exiger la prise de telles décisions unilatérales.
  • Les gouvernements peuvent légiférer pour s’octroyer l’autorité légale d’imposer la marche à suivre établie dans les protocoles de priorisation aux médecins et autres professionnels de la santé, ainsi que pour offrir à ceux-ci une protection en matière de responsabilité lorsqu’ils agissent de bonne foi, conformément à de tels protocoles, ce qui aurait pour effet d’appuyer ces médecins et autres professionnels de la santé et de leur permettre de continuer de prodiguer aux patients les soins requis avec confiance, sans crainte de mesures disciplinaires ou de poursuites au civil ou au criminel.
  • Les Collèges peuvent mettre en œuvre diverses initiatives réglementaires et politiques afin de protéger des mesures disciplinaires les médecins et autres professionnels de la santé qui appliquent des protocoles de priorisation établis et qui relèvent les défis particuliers que présente la COVID-19.
  • S’il était allégué qu’une ressource de soins intensifs avait été retirée à un patient sans que l’on ait préalablement conclu à la futilité du traitement et obtenu le consentement du patient ou de son décideur remplaçant, les tribunaux et les Collèges tiendraient habituellement compte de la mise en œuvre d’un protocole accepté de priorisation.
  • Le non-respect d’un protocole établi de priorisation pourrait également mener à des poursuites au civil ou au criminel et à des mesures disciplinaires.

Vision d’avenir

  • Si le nombre de patients atteints de la COVID-19 connaît une forte augmentation semblant pouvoir causer une pénurie de ressources, les protocoles de priorisation s’appliqueront alors à tous les patients, y compris ceux qui présentent d’autres problèmes médicaux pouvant nécessiter les mêmes ressources que les patients atteints de la COVID-19.
  • Les protocoles de priorisation élaborés en réponse à la COVID-19 ne doivent être suivis que conformément aux modalités spécifiques à leur mise en œuvre et application dans une situation d’augmentation extrême du nombre de patients. Il n’y a plus lieu de s’y fier pour la prestation des soins une fois qu’ils ne sont plus en vigueur.

Autres ressources

Suggestions de lecture


AVIS DE NON-RESPONSABILITÉ : Les renseignements publiés dans le présent document sont destinés uniquement à des fins éducatives. Ils ne constituent pas des conseils professionnels spécifiques de nature médicale ou juridique et n’ont pas pour objet d’établir une « norme de diligence » à l’intention des professionnels des soins de santé canadiens. L’emploi des ressources éducatives de l’ACPM est sujet à ce qui précède et à la totalité du Contrat d’utilisation de l’ACPM.