■ Sécurité des soins :

Amélioration de la sécurité des patients et réduction des risques

L’utilisation judicieuse des guides de pratique clinique

Une médecin travaille sur un ordinateur portable

4 minutes

Publié : décembre 2021

Les renseignements présentés dans cet article étaient exacts au moment de la publication

Bien que les guides de pratique clinique fiables n’établissent pas nécessairement la norme de pratique, ils favorisent la prestation de soins de qualité, et il peut être utile de les respecter.

Les guides de pratique clinique regroupent un ensemble d’énoncés qui aident les patients et les médecins à prendre des décisions au sujet des soins de santé appropriés dans des circonstances cliniques précises.1 Publiés sous différentes formes, ils peuvent notamment être consultés dans des revues à comité de lecture ou sur le site web d’organismes de soins de santé.

Lorsqu’ils sont suivis de manière adéquate, les guides de pratique clinique fiables peuvent améliorer la qualité des soins prodigués aux patients. Néanmoins, les médecins doivent toujours se fier à leur jugement lorsqu’ils doivent déterminer s’il convient de suivre les guides de pratique clinique dans un cas particulier.

Guides de pratique clinique et décisions cliniques

Il est avisé, pour les médecins, de connaître les guides de pratique clinique qui font autorité et qui sont pertinents à l’égard de leur pratique. En général ceux qui font autorité reposent sur les résultats d’études contrôlées à répartition aléatoire, alors que ceux que l’on juge moins fiables regroupent des opinions cliniques qui ne sont pas étayées par des données probantes, ou qui se fondent sur des données contradictoires.2

Au moment d’évaluer les différentes options thérapeutiques possibles dans un cas particulier, il arrive que la décision clinique appropriée semble contraire au guide de pratique clinique reconnu et accepté. Dans un tel cas, il est bon de demander l’avis d’une autre personne parmi ses collègues ou les spécialistes en la matière.

Les médecins qui s’écartent des guides de pratique clinique établis doivent consigner la raison qui les incite à le faire. Ils doivent également consigner toute discussion avec les patients portant sur les risques et les bienfaits des différentes options thérapeutiques envisagées, y compris celles figurant dans les guides de pratique clinique établis, ainsi que le consentement explicite des patients au traitement choisi.

Guides de pratique clinique et norme de pratique

Dans les cas d’actions judiciaires liées à des allégations de négligence contre des médecins, les tribunaux doivent déterminer si les soins prodigués étaient conformes ou non à la norme de pratique acceptée. Les deux parties doivent donc présenter des éléments de preuve pour confirmer la norme de pratique établie, dans le cas concerné, et pour déterminer si cette norme a bien été respectée. En général, les tribunaux ne reconnaissent pas qu’un guide de pratique clinique puisse servir à déterminer une norme de pratique si les experts ne peuvent témoigner de son applicabilité dans le dossier en question. Cet avis sera fourni par les experts médicaux retenus par les parties en cause, qui y formuleront leur opinion quant aux normes médicales au moment de la prestation des soins.

Aussi, un expert médical peut affirmer qu’un guide de pratique clinique particulier était représentatif de la norme de pratique au moment de la prestation des soins, alors qu’un autre expert médical peut se prononcer au sujet du niveau d’acceptation d’un guide de pratique clinique dans la communauté médicale. Dans les deux cas, les tribunaux se reposent sur l’opinion de l’expert, et non sur le guide de pratique clinique en soi, pour prendre ses décisions.

Les tribunaux ne reconnaissent pas la capacité d’un guide de pratique clinique à déterminer la norme de pratique, même si certains membres de la communauté médicale jugent qu’il fait autorité. Au moment d’établir la norme de pratique, ils accordent souvent une plus grande importance au témoignage d’un « collègue prudent » qu’à un guide de pratique clinique.

Autres éléments à considérer

Bien que les instances décisionnelles, dans le cadre des actions judiciaires, n’aient pas les mêmes connaissances que les experts médicaux, elles sont au fait de certaines réalités importantes au sujet de la portée et de l’utilité des guides de pratique clinique. En général, les tribunaux reconnaissent : 

  • que les décisions des médecins ne doivent pas être soupesées en fonction d’une norme de perfection ou d’infaillibilité, et qu’il faut distinguer les issues défavorables des actes de négligence (ou, au Québec, de faute professionnelle);3
  • que l’adoption d’une école de pensée respectée qui diffère de celle des collègues ne témoigne pas de la négligence (ou, au Québec, de la faute professionnelle) dans les soins prodigués;
  • qu’il peut s’écouler un certain temps entre la publication des guides de pratique clinique et leur mise en application par les médecins;
  • que les experts médicaux émettent leur opinion une fois l’issue clinique connue, ce qui peut avoir une incidence sur leur perception objective des soins cliniques.

Les tribunaux tiennent compte du contexte plus large de l’incident et évaluent l’ensemble de la preuve – y compris les guides de pratique clinique présentés par les experts médicaux – pour vérifier si la même norme de pratique aurait été suivie par tout médecin aux compétences similaires dans une situation semblable.

En bref

Les tribunaux peuvent entendre des témoignages d’experts attestant de la pertinence d’un guide de pratique clinique par rapport à la question dont ils sont saisis. Cependant, un guide de pratique clinique seul ne permet pas nécessairement de déterminer la norme de pratique. Néanmoins, il est judicieux pour les médecins qui dérogent à un guide de pratique clinique de consigner au dossier la raison qui les incite à le faire ainsi que le consentement éclairé des patients. Lorsque les soins prodigués sont remis en question, ces mesures peuvent aider à justifier les décisions qui ont été prises.


Références

  1. Association médicale canadienne. AMC Joule;2021. Pour proposer un guide [cité le 28 septembre 2021]. Disponible : https://joulecma.ca/fr/cpg/pour-proposer-un-guide
  2. Jutras D. Clinical practice guidelines as legal norms. CMAJ. 1993;148(6):905
  3. Moffett P, Moore G. The standard of care: Legal history and definitions: The bad and good news. West J Emerg Med. 2011;12(1):109-112

AVIS DE NON-RESPONSABILITÉ : Les renseignements publiés dans le présent document sont destinés uniquement à des fins éducatives. Ils ne constituent pas des conseils professionnels spécifiques de nature médicale ou juridique et n’ont pas pour objet d’établir une « norme de diligence » à l’intention des professionnels des soins de santé canadiens. L’emploi des ressources éducatives de l’ACPM est sujet à ce qui précède et à la totalité du Contrat d’utilisation de l’ACPM.