■ Procédures judiciaires et réglementaires :

Navigation des processus juridiques ou réglementaires

Un témoignage efficace : ce que cela implique

Un micro dans une salle d’audience

6 minutes

Publié : juin 2018 /
Révisé : septembre 2022

Les renseignements présentés dans cet article étaient exacts au moment de la publication

Les médecins sont parfois appelés à témoigner devant un tribunal, un organisme de réglementation de la médecine (Collège) ou un autre type de tribunal administratif (p. ex. une commission des accidents du travail), notamment à titre de médecins traitants, d’évaluateurs médicaux indépendants ou d’experts.

Médecins traitants

Dans le cadre d’une procédure, les médecins traitants sont le plus souvent appelés en tant que témoins des faits. S’ils doivent témoigner, on leur demande la plupart du temps d’attester de ce qu’ils ont vu ou entendu lors de la situation en question, d’établir les faits de l’affaire tels qu’ils les connaissent, ou encore d’expliquer leur diagnostic, pronostic et traitement si on les convoque en tant que médecins traitants.

Il est possible qu’avant de comparaître, ils soient invités à rencontrer une avocate ou un avocat pour discuter des preuves. Si c’est le cas, ou s’ils sont cités à comparaître, ils doivent tout de même avoir une autorisation signée de la patiente ou du patient ou une ordonnance du tribunal avant de fournir des dossiers ou de parler du cas à un tiers.

Évaluateurs médicaux indépendants

Il est possible que des médecins ayant effectué une évaluation médicale indépendante (EMI) doivent témoigner.

Bien que les lois sur la protection de la vie privée obligent les médecins à fournir aux patients une copie du rapport d’EMI, ils ne sont pas tenus de discuter avec eux – ni avec l’avocate ou l’avocat qui les représente – des détails de leur témoignage. Si on leur demande de parler aux patients ou à leur avocate ou avocat avant de témoigner, ils devraient d’abord communiquer avec la tierce partie qui a demandé l’EMI pour s’assurer que cette discussion est appropriée.

Experts

Les médecins traitants ne sont habituellement pas considérés comme des témoins experts. De façon générale, ils ne sont pas tenus de se conformer aux mêmes exigences procédurales que les experts, lesquels sont notamment appelés à déclarer qu’ils reconnaissent leur devoir envers le tribunal ou à signer un formulaire à cet effet. Cela dit, il arrive que des juristes demandent aux médecins traitants de se conformer à ces règles. Pour clarifier les choses, les médecins devraient idéalement discuter avec la ou le juriste de leur rôle au procès; ils devraient aussi établir s’ils consentent à témoigner sur des sujets qui se situent hors du cadre de leurs observations cliniques directes.

C’est aux médecins eux-mêmes de décider s’ils consentent à agir en tant qu’experts, en évaluant entre autres s’ils se sentent suffisamment qualifiés pour émettre une opinion sur le sujet. Bien qu’ils ne soient pas tenus d’agir comme experts, de nombreux médecins estiment qu’ils ont l’obligation professionnelle de le faire pour le demandeur ou pour le défendeur. L’ACPM appuie ce point de vue et encourage les médecins à demeurer membres de l’Association afin d’être admissibles à une assistance en cas de problèmes médico-légaux découlant de leur travail à titre d’experts.

Avant d’accepter un mandat en ce sens, les médecins devraient vérifier s’ils ont un conflit d’intérêts réel ou perçu. Il existe de nombreuses circonstances où un conflit peut survenir (p. ex. experts ayant été médecins traitants de la partie adverse, ayant déjà discuté de l’affaire avec un autre tiers ou entretenant une relation personnelle ou professionnelle étroite avec l’un des tiers). Si la ou le médecin pense être en conflit d’intérêts, il lui faut exprimer ses préoccupations dès que possible auprès de la personne concernée (tiers ayant sollicité ses services ou juriste).

Les experts comme les juristes devraient s’assurer de bien comprendre la relation qui les unit et leurs attentes respectives. Par exemple, il faut clairement établir les paramètres de l’opinion demandée, le temps requis pour la rédaction du rapport, les échéances à respecter et les détails concernant la rémunération.

Lorsque des médecins agissent en tant qu’experts, ils doivent savoir que leur rôle est d’aider les personnes impliquées dans le processus judiciaire à comprendre et à trancher des questions sur la base de données médicales probantes souvent complexes. Quelle que soit la nature du mandat ou la personne qui rembourse les frais engagés, les experts ont l’obligation de présenter leur témoignage de manière objective, professionnelle et fidèle. Ils ne devraient pas agir comme porte-parole du tiers qui les a engagés. En fait, selon les règles de procédure de certaines provinces, les experts doivent certifier qu’ils comprennent bien que leur devoir est envers le tribunal et non envers un tiers en particulier.

Des juges ont déjà critiqué certains experts médicaux qui avaient clairement démontré un parti pris. Dans de telles circonstances, il s’ensuit généralement que les témoignages sont rejetés ou qu’on leur accorde moins de poids. Dans les cas les plus flagrants, cela peut même amener le tribunal à remettre en question l’intégrité de l’experte ou de l’expert.

Les médecins qui souhaitent s’informer sur le rôle d’expert sont invités à consulter leur organisme de réglementation de la médecine (Collège), leur association ou fédération médicale ou une autre organisation médicale (c.-à-d. une organisation de médecins spécialistes), qui ont sans doute des ressources sur le sujet.

Les médecins appelés à prendre part à une action judiciaire en tant qu’experts ne sont pas toujours invités à témoigner. Il arrive par exemple qu’ils agissent comme consultants – tôt dans le processus, généralement – pour transmettre leurs connaissances sur la médecine et participer à l’évaluation du bien-fondé d’un dossier. Et même lorsqu’on s’attend à ce que ces personnes rédigent un rapport et livrent un témoignage, il est possible qu’elles ne soient pas tenues de témoigner au final : dans les faits, très peu de dossiers aboutissent à une audience.

En bref

Quel que soit le rôle que vous jouerez à votre comparution (médecin traitant, évaluateur médical indépendant ou témoin expert), les suggestions suivantes peuvent vous aider à livrer votre témoignage avec confiance et efficacité :

  1. Préparez-vous

    • Relisez les rapports que vous avez rédigés il y a peut-être quelques années déjà. Votre témoignage devrait reposer sur les constatations objectives consignées dans votre dossier ou rapport clinique.
    • Examinez au préalable tous les dossiers ou rapports pertinents afin de vous familiariser avec leur contenu. Cela inclut la documentation médicale citée dans votre rapport ou dans les rapports d’autres experts.
    • Vérifiez auprès de votre juriste la date, l’heure et l’endroit précis où vous devrez témoigner, et confirmez quels sont les dossiers et autres documents que vous devrez apporter.
  2. Respectez le protocole du tribunal

    • Présentez-vous à l’audience à l’heure dite, voire avant, en tenue d’affaires.
    • Lorsqu’un échange a lieu entre les autres instances présentes (juriste, juge, arbitre ou personne représentant une commission, par exemple), gardez le silence jusqu’à ce qu’on vous demande de poursuivre.
    • N’oubliez pas que l’objectivité, le calme et la courtoisie sont de mise en tout temps. Évitez d’être inutilement sur la défensive. Ne laissez pas le ton ou la nature de la question influencer votre réponse. Si vous n’êtes pas d’accord avec une proposition qui vous est faite, faites-le savoir et expliquez brièvement pourquoi.
  3. Communiquez clairement

    • Assurez-vous de bien comprendre ce qu’on vous demande avant de répondre. N’hésitez pas à demander que la question soit répétée ou reformulée. Si vous ignorez la réponse, n’hésitez pas à le dire. Prenez le temps nécessaire pour réfléchir à votre réponse.
    • Parlez clairement, lentement et assez fort pour que tout le monde puisse vous entendre. N’hésitez pas à présenter des dossiers ou des diagrammes à l’appui de vos propos si vous le jugez utile. Utilisez un langage simple et évitez le jargon médical trop complexe. Si l’utilisation de certains termes médicaux est inévitable ou s’avère utile à votre témoignage, expliquez clairement ce qu’ils signifient.
    • Répondez aux questions de façon honnête et succincte, sans toutefois laisser de points en suspens. Abstenez-vous d’exagérer, d’enjoliver les choses ou de vous écarter du cadre de la question qui vous a été posée.

AVIS DE NON-RESPONSABILITÉ : Les renseignements publiés dans le présent document sont destinés uniquement à des fins éducatives. Ils ne constituent pas des conseils professionnels spécifiques de nature médicale ou juridique et n’ont pas pour objet d’établir une « norme de diligence » à l’intention des professionnels des soins de santé canadiens. L’emploi des ressources éducatives de l’ACPM est sujet à ce qui précède et à la totalité du Contrat d’utilisation de l’ACPM.