■ Obligations et responsabilités :

Les attentes vis-à-vis des médecins

Vaccination : sécurité – réticence – refus

Fille recevant une injection de vaccin dans le bras gauche

10 minutes

Publié : juin 2021

Les renseignements présentés dans cet article étaient exacts au moment de la publication

Les vaccins sont importants pour prévenir et freiner les maladies infectieuses;1 ils ont permis de sauver d’innombrables vies.2 Pendant la pandémie de COVID-19, la conception et la distribution de vaccins constituent une grande priorité dans la lutte contre le virus.

Les médecins qui offrent des services de vaccination doivent être conscients de leurs obligations, dont celle de remettre à leurs patients (ou à leurs tuteurs légaux) suffisamment de renseignements sur les vaccins recommandés pour leur permettre de prendre une décision éclairée. Le Comité consultatif national de l’immunisation (CCNI) constitue une ressource utile sur les vaccins recommandés, y compris ceux contre la COVID-19.3

Si une grande partie de la population reconnaît l’importance des vaccins, d’aucuns débattent encore de leur nécessité, de leur efficacité et de leur innocuité. Une telle situation peut présenter des défis pour les médecins qui sont convaincus du bien-fondé d’un vaccin particulier, mais qui doivent faire face à la réticence ou au refus du patient ou de son tuteur légal. Les médecins doivent donc réfléchir à la manière d’aborder la réticence et le refus en ce qui a trait à la vaccination.

Pour obtenir plus de précisions sur des questions liées aux vaccins contre la COVID-19, visitez le Carrefour de l’ACPM sur la COVID-19.

Discussion des vaccins avec les patients et obtention d’un consentement éclairé

Lorsqu’un médecin détermine qu’il est dans l’intérêt d’un patient de recevoir un vaccin particulier, il se doit d’obtenir le consentement éclairé du patient (ou du tuteur légal de celui-ci) avant de le lui administrer. Dans la plupart des cas, la discussion préalable à l’obtention d’un consentement éclairé pourrait porter sur les sujets suivants :

  • les avantages du vaccin;
  • les risques du vaccin, y compris les risques importants et les risques peu courants qui s’accompagnent de conséquences graves, telles que la paralysie ou la mort;
  • les risques de la maladie que l’on veut éviter, y compris ses complications;
  • les conséquences possibles du refus de la vaccination;
  • les recommandations pertinentes de la part de groupes faisant autorité, des pouvoirs publics, des organismes provinciaux et territoriaux de réglementation de la médecine (Collèges) et des associations ou fédérations de médecins spécialistes;
  • la nécessité d’un suivi, p. ex. lorsque l’immunisation nécessite l’administration d’une série de doses;
  • les coûts associés au vaccin, lorsqu’ils ne sont pas couverts par les programmes de santé provinciaux ou territoriaux.

Si le patient (ou son tuteur légal) choisit de recevoir le vaccin, le médecin doit l’aviser des complications et des effets secondaires courants, et de la marche à suivre en présence de tels symptômes. Dans le cas des vaccins contre la COVID-19, par exemple, où les produits ont été rapidement déployés, il convient d’informer le patient que tous leurs effets secondaires possibles ne sont pas encore connus. (Pour obtenir des renseignements régulièrement mis à jour sur des questions d’ordre médico-légal liées aux vaccins contre la COVID-19, visitez le Carrefour de l’ACPM sur la COVID-19.)

Importance de la consignation au dossier

Une fois que la discussion préalable à l’obtention d’un consentement éclairé a eu lieu, la teneur de celle-ci et le consentement accordé par le patient (ou son tuteur légal) à l’administration du vaccin doivent être consignés dans le dossier médical du patient, le dossier désigné de la province ou du territoire, ou les deux. Le processus d’obtention d’un consentement va au-delà d’un simple formulaire à remplir : il s’agit d’une conversation, comme indiqué précédemment. Le médecin devrait également conserver dans le dossier du patient ou le dossier désigné de la province ou du territoire tout formulaire de consentement que le patient a signé.

Le Guide canadien d’immunisation de l’Agence de la santé publique du Canada recommande aux professionnels de la santé de consigner les vaccins administrés dans les documents suivants : le carnet de vaccination personnel conservé par la personne vaccinée (ou par son tuteur légal); le dossier personnel de santé du patient tenu par le professionnel de la santé qui a administré le vaccin; et le registre d’immunisation local, provincial ou territorial (s’il en existe un).4

Pour aider les patients (ou leurs tuteurs légaux) à gérer leurs vaccins (y compris le maintien d’un registre des vaccins reçus), les médecins pourraient les orienter vers des ressources telles que celles publiées dans les sites web de Santé Canada, de l’Agence de la santé publique du Canada et d’Immunisation Canada.

Importance du suivi

L’administration d’une série de doses (comme dans le cas de certains des vaccins contre la COVID-19) est parfois requise pour assurer une immunisation adéquate. Le médecin doit, avant d’administrer la première dose, rappeler au patient ou au tuteur légal de celui-ci l’importance de recevoir toutes ces doses selon le calendrier d’immunisation établi. Les médecins devraient connaître les calendriers de vaccination de leur province ou de leur territoire et discuter avec leurs patients des risques auxquels ceux-ci s’exposent s’ils tardent à accepter l’administration des doses.5 Il pourrait être utile de mettre en place un système de suivi des patients qui ne se présentent pas pour recevoir leurs doses subséquentes, et de consigner les mesures prises et la réponse du patient (ou de son tuteur légal).

Réticence ou refus des patients ou de leurs tuteurs légaux

Bien que la vaccination systématique soit recommandée pour prévenir certaines maladies infectieuses3,6 et que la majeure partie de la population l’accepte bien, certaines personnes la refusent ou la reportent pour elles-mêmes ou pour leurs enfants.7,8,9 Des responsables de la santé publique et des chercheurs ont exprimé des inquiétudes quant à la possibilité de voir la réticence ou le refus face aux vaccins accroître le risque d’épidémies de maladies évitables par la vaccination.10,11,12

Lorsque le patient (ou son tuteur légal) exprime des réticences au sujet d’un vaccin, le médecin devrait explorer et aborder les raisons qui sous-tendent les préoccupations exprimées, répondre de son mieux à toutes les questions du patient et envisager d’orienter ce dernier (ou son tuteur légal) vers d’autres sources pertinentes de renseignements.5 Par exemple, le médecin pourrait diriger des parents qui hésitent vers le site web de la Société canadienne de pédiatrie, au www.soinsdenosenfants.cps.ca, ou vers #LaScienceDabord, un mouvement dans les médias sociaux mis sur pied par une équipe de scientifiques indépendants dans le but de mettre la science au premier plan dans la présentation de renseignements.

Les médecins doivent faire preuve d’empathie et de respect tout au long de ces discussions, et rappeler aux patients ou à leurs tuteurs légaux que leurs intérêts (ou ceux de l’enfant) demeurent l’enjeu principal de la relation thérapeutique.5 Des articles13 et des ressources utiles sont accessibles, tels que le point de pratique publié en 2018 par la Société canadienne de pédiatrie, « Les parents qui hésitent à faire vacciner leur enfant : une approche clinique », qui présente des approches utiles (fondées sur des données probantes) pour assurer une communication efficace.5

Les médecins ne doivent ménager aucun effort pour continuer à prodiguer, dans le cadre de leur relation existante avec leurs patients, des soins conformes aux normes de pratique en vigueur.14 Pour obtenir de l’assistance et des conseils à l’égard de patients qui expriment des réticences face à un vaccin, les médecins devraient consulter leur Collège ou d’autres organisations comme la Société canadienne de pédiatrie. Pour ce qui a trait aux questions d’ordre médico-légal, ils devraient communiquer avec l’ACPM.

Malgré de bonnes explications, les parents ou les tuteurs légaux pourraient continuer de refuser la vaccination de leurs enfants. Sauf au Québec, les médecins doivent généralement respecter la décision éclairée formulée par un enfant qu’ils considèrent être un mineur mature, en mesure de comprendre les risques du refus de la vaccination. Au Québec, la loi n’autorise en général que les enfants de 14 ans ou plus à consentir aux soins.15 Les médecins doivent consigner les souhaits du mineur et du parent, s’ils sont connus, dans le dossier médical, avec l’évaluation médicale de l’aptitude de l’enfant à consentir aux soins et à comprendre les risques.15

À la suite du refus d’un vaccin recommandé, une note détaillée traitant de la discussion qui visait à obtenir le consentement, ainsi que du refus du patient, doit être consignée dans le dossier médical. Le médecin doit également s’assurer de ne pas couper les ponts avec le patient, de façon à permettre de futures discussions sur l’immunisation; il doit également envisager d’orienter le patient ou son tuteur légal vers une source fiable de renseignements à ce sujet.5

Le refus de la vaccination pour des raisons strictement économiques pourrait troubler certains médecins. Le patient ou son tuteur légal peut être avisé de communiquer avec le ministère de la Santé de la province ou du territoire pour s’enquérir de l’assistance et des programmes offerts en matière de vaccination.

Dans des circonstances exceptionnelles, comme lorsqu’un patient (ou son tuteur légal) a refusé la vaccination, bien que le vaccin en question soit approprié sur le plan médical et nécessaire pour maintenir la vie ou la santé de l’enfant, il pourrait s’avérer nécessaire que les médecins communiquent avec l’agence de protection de l’enfance. Pour obtenir des renseignements sur les agences de protection de l’enfance au Canada, les médecins peuvent se reporter au Portail canadien de la recherche en protection de l’enfance.16 Les médecins peuvent également communiquer avec l’ACPM pour obtenir des conseils lorsqu’ils font face à de telles circonstances.

Questions sur les solutions de rechange à la vaccination

Les patients (ou leurs tuteurs légaux) pourraient avoir des questions au sujet de solutions de rechange à la vaccination systématique, telles que des traitements homéopathiques non éprouvés.17 Pour pouvoir y répondre adéquatement, les médecins de première ligne et ceux qui exercent dans des domaines connexes doivent maintenir leurs connaissances à jour quant aux vaccins courants ou pertinents, à leur efficacité, aux risques importants qui pourraient leur être associés et aux risques propres aux maladies que ces vaccins cherchent à prévenir. Les médecins doivent se préparer de façon à pouvoir dialoguer de manière claire et professionnelle avec les patients ou leurs tuteurs légaux à ce sujet. Il est à noter que les conseils d’un professionnel de la santé exercent généralement une influence importante sur le processus décisionnel concernant les vaccins.5

Soins aux patients non vaccinés

Les médecins ayant des patients non vaccinés doivent songer à aménager leur cabinet de façon à réduire tout risque que ces patients entrent en contact avec des patients vulnérables, tels que ceux qui sont immunosupprimés ou qui n'ont pas encore été vaccinés. Une approche possible serait de fixer des rendez-vous à différents moments de la journée ou de la semaine pour assurer les soins de chaque type de patient. Les médecins doivent encourager les patients non vaccinés ou leurs tuteurs légaux à informer les professionnels de la santé avec lesquels ils entrent en contact du fait qu’ils ne sont pas complètement immunisés. Ces mesures sont d’importance cruciale dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

En bref

  • Offrez des renseignements aux patients ou à leurs tuteurs légaux au sujet des avantages et de tous les risques importants associés aux vaccins recommandés, ainsi qu’à la maladie que l’on cherche ainsi à prévenir.
  • Menez la discussion visant à obtenir le consentement éclairé de façon rigoureuse lorsque vous recommandez de nouveaux vaccins, tels que ceux contre la COVID-19.
  • Familiarisez-vous avec le calendrier de vaccination, les lois applicables et les politiques de votre Collège à l’égard de la vaccination dans la province ou le territoire où vous exercez.
  • Consignez dans le dossier médical, le dossier désigné de la province ou du territoire, ou les deux, les renseignements que vous remettez à vos patients et leurs réactions (y compris les motifs invoqués pour le refus du vaccin, le cas échéant).
  • Consignez également les vaccins qui ont fait l’objet d’une discussion avec vos patients, ce que vous leur administrez ou ce qu’ils refusent de recevoir.
  • Les patients (ou leurs tuteurs légaux) ont le droit d’accepter ou de refuser un vaccin. Faites preuve de patience et d’empathie envers les besoins et les croyances de vos patients et assurez-vous de ne pas couper les ponts avec eux.
  • Planifiez le suivi des patients pour mener à terme le processus de vaccination, au besoin, et consignez les mesures prises au dossier.

Références

  1. Agence de la santé publique du Canada. ASPC;14 février 2020. Guide canadien d’immunisation : Introduction [cité le 18 février 2021] Disponible : https://www.canada.ca/fr/public-health/services/canadian-immunization-guide/introduction.html
  2. Chan M. Organisation mondiale de la Santé;2017. Dix ans de santé publique 2007-2017 : Rapport du Dr Margaret Chan, directeur général, Organisation mondiale de la Santé [cité le 18 février 2021] Disponible : https://www.who.int/publications/10-year-review/fr/
  3. Agence de la santé publique du Canada. ASPC;15 février 2021. Comité consultatif national de l'immunisation (CCNI) : Déclarations et publications [modifié le : 15 février 2021; cité le 18 février 2021] Disponible : https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/publications/vie-saine/guide-canadien-immunisation-partie-1-information-cle-immunisation.html
  4. Agence de la santé publique du Canada. ASPC;2 février 2016. Guide canadien d’immunisation : Dossiers de vaccination [modifié le 1er septembre 2016; cité le 18 février 2021] Disponible : https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/publications/vie-saine/guide-canadien-immunisation-partie-1-information-cle-immunisation.html
  5. MacDonald NE, Desai S, Gerstein B. Société canadienne de pédiatrie. Les parents qui hésitent à faire vacciner leurs enfants : une mise à jour. Paediatr Child Health. 2018 [cité le 18 février 2021];23(8)562 DOI: https://doi.org/10.1093/pch/pxy144 Disponible : https://www.cps.ca/fr/documents/position/les-parents-qui-hesitent-a-faire-vacciner-leurs-enfants
  6. Société canadienne de pédiatrie. SCP;26 avril 2016. En faisons-nous assez? Un rapport de la situation des politiques publiques canadiennes et de la santé des enfants et des adolescents [cité le 18 février 2021] Disponible : https://www.cps.ca/uploads/advocacy/SR16_FRE.pdf
  7. Dubé E, Gagnon D, Quakki M, et al. Measuring vaccine acceptance among Canadian parents: A survey of the Canadian Immunization Research Network. Vaccine. 2018 Jan 25 [cité le 18 février 2021];36(4);545-552. DOI: 10.1016/j.vaccine.2017.12.005
  8. Agence de la santé publique du Canada. ASPC;janvier 2021. Couverture vaccinale des enfants canadiens : Résultats de l’enquête nationale sur la couverture vaccinale des enfants (ENCVE), 2017 [modifié le 29 janvier 2021; cité le 18 février 2021] Disponible : https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/publications/vie-saine/2017-enquete-nationale-couverture-vaccinale-enfants.html
  9. Angus Reid Institute. ARI;14 décembre 2021. More Canadians willing to roll up their sleeves right away as national COVID-19 vaccine rollout begins [cité le 18 février 2021] Disponible : http://angusreid.org/canada-covid-vaccine-december/
  10. Organisation mondiale de la Santé. OMS;2019. Thèmes de santé : Dix ennemis que l’OMS devra affronter cette année [cité le 18 février 2021] Disponible : https://www.who.int/fr/news-room/spotlight/ten-threats-to-global-health-in-2019
  11. Kempe A, Saville AW, Albertin C, et al. Parental hesitancy about routine childhood and influenza vaccinations: A national survey. Pediatrics. Juillet 2020 [cité le 18 février 2021];146(1): e20193852. DOI: https://doi.org/10.1542/peds.2019-3852
  12. De Figueiredo A, Simas C, Karafillakis E, et al. Mapping global trends in vaccine confidence and investigating barriers to vaccine uptake: a large-scale retrospective temporal modelling study. Lancet. 26 septembre 2020 [cité le 18 février 2021];396(10255):898-908 DOI: https://doi.org/10.1016/S0140-6736(20)31558-0 Disponible : https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(20)31558-0/fulltext
  13. Gagneur A. Motivational interviewing: A powerful tool to address vaccine hesitancy. Can Commun Dis Rep 2020 [cité le 18 février 2021];46(4):93–7. DOI: https://doi.org/10.14745/ccdr.v46i04a06
  14. Shen S, Dubey V. Addressing vaccine hesitancy. Clinical guidelines for primary care physicians working with parents. Can Fam Physician. Mars 2019 [cité le 18 février 2021};65(3)175-181 Disponible : http://www.cfp.ca/content/65/3/175?rss=1.full.pdf+html
  15. Association canadienne de protection médicale. ACPM;Mai 2014. Un enfant est-il apte à consentir? [cité le 18 février 2021] Disponible: https://www.cmpa-acpm.ca/fr/advice-publications/browse-articles/2014/can-a-child-provide-consent
  16. Portail canadien de la recherche en protection de l’enfance. CWRP. Assistance au niveau provincial et territorial. [cité le 18 février 2021] Disponible : https://cwrp.ca/fr/assistance-au-niveau-provincial-et-territorial
  17. Loeb M, Russell ML, Neupane B, et al. A randomized, blinded, placebo-controlled trial comparing antibody responses to homeopathic and conventional vaccines in university students. Vaccine. 19 novembre 2018 [cité le 18 février 2021];36(48):7423-7429 DOI: 10.1016/j.vaccine.08.082 Disponible : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30352746/

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