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Traiter les personnes transgenres et non binaires

7 minutes

Publié : juin 2015 /
Révisé : juin 2023

Les renseignements présentés dans cet article étaient exacts au moment de la publication

La stigmatisation, l’isolement dans la recherche des soins et la discrimination rendent souvent les personnes transgenres vulnérables aux disparités en santé. Dans de nombreux dossiers de plaintes concernant les organismes de réglementation de la médecine (Collèges) et ceux relatifs aux droits de la personne, l’ACPM constate que ce sont les problèmes de communication qui créent ou contribuent à l’expérience négative vécue par les personnes transgenres. Les médecins qui prodiguent des soins à des personnes transgenres ou non binaires, ou qui sont appelés à le faire, doivent tenir compte des questions déontologiques et légales liées à ce type de soins.

Comprendre la terminologie

Les termes transgenre et trans désignent toute personne dont le genre ne correspond pas à celui leur ayant été attribué à la naissance. Les personnes transgenres peuvent changer de nom et adopter de nouveaux pronoms personnels. Dans certains cas, elles subissent également des traitements médicaux et des interventions médicales pour que leur corps corresponde à leur identité de genre.

Le terme non binaire désigne toute personne dont l’identité sexuelle n’entre pas dans les catégories binaires « homme » et « femme »; les personnes non binaires préfèrent parfois qu’on utilise le pronom iel pour les désigner.

L’expression personnes de diverses identités de genre désigne les personnes dont l’identité et l’expression de genre diffèrent des normes en matière de genre et inclut les personnes transgenres et non binaires.

Lois à l’égard des droits de la personne

Toute personne a un droit d’accès aux services de santé sans discrimination et harcèlement. Lorsque les médecins prodiguent des services médicaux, ils ne doivent pas discriminer en fonction de l’identité de genre.

Alors que la discrimination des personnes transgenres et non binaires est considérée dans certaines provinces ou certains territoires comme étant une discrimination en raison de l’identité sexuelle ou du genre,1 de nombreuses provinces et territoires reconnaissent expressément l’identité de genre en tant que motif de discrimination prohibé dans leur loi sur les droits de la personne.2

Déclarations des commissions des droits de la personne

Quelques commissions des droits de la personne ont publié des politiques et des lignes directrices concernant la discrimination contre les personnes transgenres. Ces documents peuvent être des ressources utiles pour les médecins qui cherchent à comprendre leurs obligations légales; vous trouverez ces publications sur les sites web de chaque commission des droits de la personne des provinces ou des territoires. Par exemple, dans sa Politique sur la prévention de la discrimination fondée sur l’identité sexuelle et l’expression de l’identité sexuelle [PDF], la Commission ontarienne des droits de la personne aborde expressément les questions liées aux obstacles que rencontrent les personnes transgenres et non binaires qui veulent accéder aux services de santé.

Politiques et lignes directrices

Selon le Code d’éthique et de professionnalisme de l’Association médicale canadienne, les médecins qui fournissent des services médicaux doivent « accepter les patients sans discrimination (p. ex. : …expression ou identité de genre…) ». Cependant, les médecins « conservent leur droit de refuser de soigner un patient pour des raisons légitimes » et doivent se garder de « franchir les limites de leurs connaissances et de leurs compétences ».

En général, les Collèges déclarent que les médecins ne doivent pas refuser d’accepter des patientes et patients, de prodiguer des soins à patientes et patients actuels ou de mettre fin à la relation médecin-patient en se fondant sur l’identité de genre. Cependant, le refus de prodiguer un traitement particulier à la demande d’une patiente ou d’un patient ne constitue pas en soi de la discrimination.

Noms et pronoms

Les médecins doivent faire preuve de dignité, de respect et de sensibilité dans leurs communications avec leur patientèle. Les personnes transgenres et non binaires peuvent exprimer le souhait de se faire appeler selon un nom qui diffère de leur nom légal ou d’être interpellée par un pronom qui correspond à leur identité de genre. Les médecins doivent satisfaire de telles demandes et utiliser le nom et le pronom que ces personnes préfèrent.

Refus de prodiguer des soins

Alors que les médecins ne doivent pas refuser de traiter des personnes transgenres pour des raisons discriminatoires, ils ne sont pas requis de prodiguer des soins qui excèdent leur champ de pratique.

Dans une instance du Tribunal des droits de la personne de l’Ontario, une plainte contre un chirurgien esthétique a été rejetée; celui-ci était accusé de discrimination pour avoir refusé d’exécuter une labioplastie et une augmentation mammaire sur deux personnes transgenres. Le tribunal a accepté la défense que le chirurgien n’avait pas l’expertise requise pour effectuer les interventions et a conclu que « pour les professionnels, la connaissance des limites de sa propre expertise et de ses compétences constitue une composante importante de bonne pratique, respectant ainsi les obligations professionnelles et servant le public adéquatement. »3

Le tribunal a conclu que les médecins ne sont pas tenus d’obtenir de nouvelles compétences et de la formation pour satisfaire aux besoins d’une personne transgenre. Une telle exigence constituerait une « ingérence inappropriée » dans « l’autonomie professionnelle des médecins… en déterminant la nature de sa carrière et de sa pratique médicale. »4

Le tribunal a aussi examiné les allégations des parties plaignantes relativement au refus du chirurgien de prodiguer le traitement. Le tribunal a reconnu que le chirurgien parlait d’un ton sec et démontrait peu d’intérêt, mais ce tribunal a aussi fait remarquer qu’il aurait été plus approprié d’expliquer les raisons pour lesquelles le chirurgien ne pouvait pas traiter les deux personnes; « les consultations au cabinet auraient ainsi été très différentes et l’expérience de ces personnes aurait été plus positive. »5

Les médecins se sentant incapables de prodiguer des soins médicaux à une personne transgenre, parce que les besoins de celle-ci excèdent leur expertise et leur compétence clinique, pourraient envisager de diriger ces personnes vers une ou un spécialiste pour les éléments de soins qu’il leur est impossible de gérer directement. La décision clinique de refuser de prodiguer des soins devrait être communiquée à la patiente ou au patient en temps opportun et de façon respectueuse et claire.

Modifications des actes de naissance et des autres dossiers officiels

Certaines personnes qui demandent de modifier l’identité de genre qui figure sur leur acte de naissance et dans d’autres dossiers officiels du gouvernement peuvent avoir besoin de l’attestation d’une ou d’un médecin, y compris d’une ou d’un médecin traitant, pour confirmer que le sexe indiqué sur le document gouvernemental ne correspond pas à leur identité de genre. Les membres qui ont des questions sur la façon de répondre à de telles demandes peuvent communiquer avec l’ACPM pour obtenir des conseils personnalisés.

Gestion des risques

  • Familiarisez-vous avec les obligations en matière des droits de la personne en vigueur ainsi que les politiques des Collèges en matière d’équité et de diversité, et assurez-vous que votre personnel les connaisse également.
  • Assurez-vous de communiquer avec votre patientèle, y compris les personnes transgenres, en faisant preuve de sensibilité et de dignité. Respectez le choix de chaque personne en ce qui concerne ses nom et prénom.
  • Envisagez de diriger les personnes qui vous consultent vers une ou un spécialiste qualifié des soins d’affirmation de genre si vous ne pouvez pas prodiguer les services médicaux demandés parce qu’ils sont au-delà de l’étendue de votre champ de pratique ou de vos compétences.
  • Consignez vos discussions avec les membres de votre patientèle dans leurs dossiers médicaux et documentez les raisons justifiant la décision ou la demande de consultation.
  • Communiquez avec l’ACPM pour obtenir des conseils au sujet de vos obligations dans des circonstances particulières.

Références

  1. Codes des droits de la personne de la Colombie-Britannique, de l’Alberta, du Québec, du Nouveau-Brunswick, du Yukon et du Nunavut.
  2. Codes des droits de la personne de la Saskatchewan, du Manitoba, de l’Ontario, de la Nouvelle-Écosse, de l’Île-du-Prince-Édouard, de Terre-Neuve et du Labrador et des Territoires du Nord-Ouest.
  3. Finan v. Cosmetic Surgicentre (Toronto) 2008, Cas du Trinunal des droits de la personne de l’Ontario. Consulté le 2 mai 2023. http://canlii.ca/t/1zrq0
  4. Ibid.
  5. Ibid.


AVIS DE NON-RESPONSABILITÉ : Les renseignements publiés dans le présent document sont destinés uniquement à des fins éducatives. Ils ne constituent pas des conseils professionnels spécifiques de nature médicale ou juridique et n’ont pas pour objet d’établir une « norme de diligence » à l’intention des professionnels des soins de santé canadiens. L’emploi des ressources éducatives de l’ACPM est sujet à ce qui précède et à la totalité du Contrat d’utilisation de l’ACPM.