Risques médico-légaux en neurochirurgie : ce que les médecins doivent savoir

Sachez quels sont vos risques – Données par spécialité clinique

Neurochirurgien utilisant un microscope opératoire

6 minutes

Publié : Novembre 2023

À la fin de 2021, l’ACPM comptait 306 spécialistes en neurochirurgie parmi ses membres (code de travail 92). Sur une période de 5 ans (2017 à 2021)1, 26,8 % des spécialistes en neurochirurgie ont été cités dans un nouveau dossier médico-légal (action en justice ou plainte auprès d’un Collège ou d’un hôpital), et 15 % ont été cités dans au moins deux nouveaux dossiers.

Aussi, d’après la moyenne de chacune des années pour cette période, 11,8 % des spécialistes en neurochirurgie ont été cités dans un nouveau dossier médico-légal, et 1,9 %, dans au moins deux nouveaux dossiers médico-légaux.

Quels sont les risques relatifs de problème médico-légal chez les spécialistes en neurochirurgie?

  •  Neurochirurgie, plaintes auprès des Collèges (n = 211)
  •  Neurochirurgie, dossiers médico-légaux (n = 257)
  • Toutes les spécialités chirurgicales, plaintes aux Collèges (n = 6 965)
  •   Toutes les spécialités chirurgicales, actions en justice (n = 4 439)

Dans les 10 dernières années, le taux de plaintes auprès des Collèges2 était semblable chez les spécialistes en neurochirurgie et l’ensemble des autres spécialités chirurgicales.

Dans les 10 dernières années, le taux d’actions civiles était significativement plus élevé en neurochirurgie, comparativement à l’ensemble des autres spécialités chirurgicales.

Les sections suivantes présentent les résultats tirés de 313 dossiers d’actions en justice, de plaintes aux Collèges et de plaintes auprès d’hôpitaux conclus par l’ACPM entre 2012 et 2021 et dans lesquels des spécialistes en neurochirurgie ont fait l’objet de critiques par des experts.

Quelles sont les plaintes le plus souvent émises par les patients et les critiques le plus couramment formulées par les experts?3 (n = 313)

Issue Plaintes par des patients (%) Critiques formulées par des experts (%)
Évaluation déficiente 42 13
Erreur de diagnostic 38 19
Processus de consentement inadéquat 27 9
Préjudice associé à la prestation de soins de santé 22 19
Surveillance ou suivi inadéquats 21 6
Manquement à faire un test ou une intervention 18 13
Erreur (intervention, patients, implant, traitement pharmacologique) 10 9
Problèmes de communication médecin-patient 10 6
Comportement non professionnel 10 3
Défaut d’orienter la personne vers une ou un collègue 8 2

Les plaintes reflètent le fait que, du point de vue des personnes traitées, un problème est survenu au cours de la prestation des soins. Les plaintes ne sont pas toujours appuyées par l’opinion d’experts. Il arrive que les experts n’aient pas de critiques à formuler quant aux soins prodigués, ou que leurs critiques ne soient pas en lien avec les allégations des patientes ou des patients. Il est donc possible que le Collège ou le tribunal ne rende pas une décision négative dans de tels cas.

Quelles sont les interventions faisant le plus souvent l’objet de critiques formulées par des experts? (n = 313)

Fusion ou fixation de vertèbres (61), Décompression de la moelle épinière (47), Excision d’un disque intervertébral (42), Réparation de vertèbres (34), Insertion, prise en charge ou retrait d’un dispositif de dérivation ventriculaire (21)

  •   Fusion ou fixation de vertèbres (61)
  •   Décompression de la moelle épinière (47)
  •   Excision d’un disque intervertébral (42)
  •   Réparation de vertèbres (34)
  •   Insertion, prise en charge ou retrait d’un dispositif de dérivation ventriculaire (21)

Dans l’ensemble, 40 % des patientes et patients cités dans ces dossiers avaient subi une chirurgie de la moelle épinière, et 22 %, une chirurgie crânienne.

La fréquence des interventions recensées dans les dossiers médico-légaux est, selon toute probabilité, représentative de ce qu’on observe dans la pratique des spécialistes en neurochirurgie; toutefois, elle ne reflète pas nécessairement les interventions à risque élevé.

Les critiques le plus couramment formulées par des experts au sujet de ces interventions sont les suivantes :

  • Évaluation déficiente
  • Manquement à faire un test ou une intervention
  • Processus de consentement inadéquat
  • Compétences chirurgicales inadéquates
  • Utilisation inadéquate du matériel de chirurgie
  • Décisions inappropriées concernant la prise en charge chirurgicale (p. ex. intervention chirurgicale inadéquate)

Quels sont les principaux facteurs associés à un préjudice grave4 dans les dossiers médico-légaux? (n = 313)

Facteurs liés aux patients5

  • Score ASA de 3 ou plus
  • Présence d’un néoplasme malin
  • Complications sous forme de perturbations visuelles ou de cécité
  • Complications sous forme de troubles paralytiques (p. ex. syndrome de la queue de cheval, paraplégie)
  • Complications sous forme de troubles du système nerveux (p. ex. compression du cerveau consécutif à l’hydrocéphalie ou à une hémorragie sous-arachnoïdienne)

Facteurs liés aux médecins6

  • Défaut de traiter la personne
  • Manquement à faire un test ou une intervention
  • Utilisation inadéquate du matériel de chirurgie
  • Surveillance ou suivi inadéquats

Facteurs liés à l’équipe 6

  • Problèmes de communication entre les médecins

Aide-mémoire pour réduire les risques

Les spécialistes en neurochirurgie peuvent gérer les risques comme suit :

Période préopératoire

  • Procéder à une anamnèse adéquate, en s’attardant notamment à la présence de comorbidités et aux médicaments que la personne prend. Faire aussi un examen physique en bonne et due forme, incluant les signes vitaux. Tenir compte des facteurs de risque pertinents et de leur impact sur la prise en charge chirurgicale.
  • Veiller à ce que les prestataires de soins qui tiennent la discussion entourant le consentement fournissent des renseignements appropriés au sujet des risques et des avantages de l’intervention proposée, des solutions de rechange, des résultats escomptés et de la possibilité que les maladies préexistantes augmentent le risque de complications. Les patientes et patients (et leur famille ou les personnes qui en prennent soin, le cas échéant) doivent avoir l’occasion de poser des questions. La discussion doit être documentée adéquatement dans le dossier médical.

Période peropératoire

  • Suivre les directives de sécurité du fabricant lors de l’utilisation du matériel chirurgical, y compris les mesures de sécurité qui s’appliquent à l’utilisation des fraiseuses.
  • Prendre en compte les risques de lésions peropératoires à chaque étape des soins chirurgicaux.
  • Voir notre article à ce sujet : Les décisions peropératoires peuvent-elles être des erreurs de diagnostic?

Période postopératoire

  • Évaluer la patiente ou le patient après l’intervention chirurgicale et consignez soigneusement son état de santé par écrit. Être à l’affût des signes de complications postopératoires. Examiner attentivement toute plainte formulée par une patiente ou un patient après une intervention et y répondre de manière appropriée, sans délai. Demander aux membres de l’équipe (p. ex. infirmières, résidents) de vous avertir si des signes ou symptômes inattendus apparaissent.
  • Assurer un suivi approprié, fournir des instructions claires aux patientes et patients (verbales ou écrites), y compris les signes et symptômes qui devraient les inciter à consulter un médecin. S’assurer que la patiente ou le patient a compris l’information fournie.

Limites

Les nombres qui figurent dans ce rapport sont tirés des données médico-légales de l’ACPM. Les dossiers médico-légaux de l’ACPM ne représentent qu’une petite proportion des incidents liés à la sécurité des patients. De nombreux facteurs peuvent inciter une personne à intenter une poursuite ou à déposer une plainte, et ces facteurs varient grandement en fonction du contexte. Les dossiers médico-légaux peuvent donc être une précieuse source d’information sur des sujets importants, mais on ne peut les considérer comme représentatifs de l’ensemble des incidents liés à la sécurité des patients.

En outre, les dossiers médico-légaux de l’ACPM traitent essentiellement des facteurs liés aux professionnels de la santé et à l’équipe; les facteurs systémiques y sont sous-représentés.

Maintenant que vous connaissez les risques liés à votre travail…

Limitez les risques médico-légaux grâce aux ressources d’apprentissage de l’ACPM.

Des questions?

Écrivez à [email protected]

Notes

  1. En moyenne, un dossier médico-légal est ouvert deux à trois ans après un incident lié à la sécurité d’une ou d’un patient. Aussi, il est possible qu’un nouveau dossier médico-légal concerne un incident survenu il y a quelques années.
  2. Les médecins ne sont pas tenus de signaler les plaintes au Collège à l’ACPM, et ils le font sur une base volontaire. Par conséquent, ces dossiers ne dressent pas le portrait complet de ce type de dossiers au Canada.
  3. Par experts, on entend les médecins qui interprètent les problèmes cliniques, scientifiques ou techniques liés aux soins prodigués et qui émettent une opinion à leur égard. Ces médecins ont habituellement une formation et une expérience semblables à celles de leurs collègues ayant prodigué les soins qu’ils doivent évaluer.
  4. Un préjudice grave est un préjudice qui cause la mort, une blessure invalidante ou une incapacité majeure. Un préjudice lié aux soins de santé peut être attribuable au risque inhérent d’une investigation, d’un médicament ou d’un traitement. II peut également découler d’une défaillance dans le processus de prestation des soins.
  5. Les facteurs liés aux patientes et patients regroupent toutes les caractéristiques ou les affections médicales présentes au moment de la consultation médicale, ou tout événement survenant durant la consultation.
  6. D’après l’opinion d’expertes et d’experts. Comprend les facteurs liés aux professionnels de la santé, à l’équipe et au système. En ce qui a trait aux dossiers de neurochirurgie, aucun facteur lié à tout système ne paraissait se dégager des données.