■ Obligations et responsabilités :

Les attentes vis-à-vis des médecins

Les médecins et la recherche : comprendre ses obligations

10 minutes

Publié : juillet 2014 /
Révisé : juillet 2023

Les renseignements présentés dans cet article étaient exacts au moment de la publication

Les médecins qui envisagent de participer à une étude clinique et de prendre part au recrutement, à l’évaluation, au traitement ou à la surveillance des sujets de recherche devraient connaître les obligations et les risques uniques qui y sont associés.

Obligations envers les sujets de recherche

L’interaction entre les médecins et les sujets qui participent à une étude s’accompagne souvent d’un devoir de diligence. Par exemple, les tribunaux peuvent déterminer que les médecins ont un devoir de diligence à l’égard des sujets de recherche qu’ils recrutent aux fins d’une étude, notamment lorsqu’il existe une relation médecin-patient préalable. Les tribunaux peuvent aussi déterminer que les médecins ont un devoir de diligence lorsqu’ils évaluent des personnes pour déterminer s’il serait dans l’intérêt de celles-ci de participer à l’étude, ou lorsqu’ils leur administrent un traitement dans le cadre de l’étude.

Les tribunaux évaluent si les médecins ont un devoir de diligence à la lumière des circonstances propres à chaque cas.

Cadre légal et déontologique

Le Code d’éthique et de professionnalisme de l’AMC stipule qu’on doit « tenir compte d’abord du mieux-être du patient. » Ce principe déontologique vaut également lorsque les patientes ou patients participent à une recherche.

Avant de recruter ou de recommander des personnes aux fins d’une étude, ou de les traiter en suivant un protocole de recherche, les médecins devraient commencer par lire soigneusement le protocole en question et se demander s’il sert les intérêts de ces personnes. Les médecins peuvent notamment se demander si ce document comprend des dispositions appropriées pour assurer la sécurité et les intérêts des sujets de recherche, et s’il convient à ces personnes en particulier.

Les obligations légales des médecins qui participent à une recherche émanent de différentes sources et peuvent varier d’une province ou d’un territoire à l’autre. Les règlements de la Loi sur les aliments et drogues définissent les exigences relatives à tous les essais cliniques portant sur des sujets humains au Canada. Les médecins doivent également connaître les lois et règlements provinciaux et territoriaux régissant la pratique de la médecine et la protection des renseignements personnels ainsi que les politiques, les lignes directrices et les codes de déontologie des organismes de réglementation de la médecine (Collèges) qui traitent des obligations à cet effet, ou qui les établissent.

Il importe aussi de tenir compte des lignes directrices et des énoncés publiés par les organismes professionnels tels que les politiques de l’AMC intitulées Les interactions avec l’industrie pharmaceutique : lignes directrices pour les médecins et Énoncé de politique des trois Conseils : Éthique de la recherche avec des êtres humains. Ces lignes directrices et énoncés n’ont pas force de loi, mais ils influencent la définition des normes de diligence auxquelles les médecins peuvent être tenus en cas de poursuite ou de plainte déposée auprès du Collège.

Agréments éthiques et réglementaires

Avant que des médecins participent à une étude de recherche, il est prudent de leur part de se demander si l’étude en question a reçu les agréments éthiques et réglementaires nécessaires. On recommande aux médecins de ne participer qu’aux recherches qui ont été examinées et approuvées par un comité d’éthique de la recherche canadien indépendant et doté de la structure appropriée. Dans certains territoires ou provinces, ce peut être une obligation légale. De plus, dans certaines provinces et certains territoires, les lois sur la protection des renseignements personnels stipulent qu’un comité d’éthique de la recherche doit approuver les études qui utilisent des renseignements médicaux personnels identifiables sans le consentement de la personne concernée.

Si la recherche comporte un essai clinique sur un nouvel agent thérapeutique, elle doit être approuvée par Santé Canada. L’approbation de l’utilisation de nouveaux médicaments au Canada est régie par les règlements de la Loi sur les aliments et drogues qui définissent en détail l’obligation du promoteur de procéder à un essai clinique conformément aux bonnes pratiques cliniques. Les essais cliniques avec des instruments médicaux doivent également être approuvés par Santé Canada.

Consentement

Comme dans le cas des autres traitements médicaux, les sujets doivent consentir à participer à une étude ou à recevoir un traitement considéré comme expérimental ou faisant partie d’une telle étude. Dans la plupart des études, la difficulté est de fournir aux sujets potentiels assez de renseignements pour leur permettre de prendre une décision éclairée. Les tribunaux ont établi que la norme en matière de divulgation est généralement plus élevée pour ce qui est du consentement à participer à une recherche, que pour les autres formes de traitement médical.

À l’instar du Code de déontologie des médecins du Québec, et bien que la nature de l’information à divulguer varie d’une étude à l’autre, le Code d’éthique et de professionnalisme de l’AMC stipule de façon générale qu’on doit informer au moins les sujets éventuels « de l’objet de l’étude, de la source du financement, de la nature et de la probabilité relative de préjudices et d’avantages, et de la nature [de la] participation [du médecin] y compris de toute rémunération ».

L'AMC suggère également d’indiquer aux sujets éventuels « ...qu’ils ont le droit de refuser de participer à l’étude ou de s’en retirer en tout temps sans nuire aux soins qu’ils reçoivent ». On peut devoir fournir d’autres éléments d’information selon la nature de l’étude et selon la législation pertinente et les politiques du Collège dans la province ou le territoire considéré.

Il est recommandé de demander que le consentement à participer à une étude se fasse par écrit. Les comités d’éthique de la recherche sanctionnent souvent l’utilisation de formulaires de consentement aux fins de leur processus d’approbation et peuvent même l’exiger. Cependant l’existence d’un formulaire signé à cet effet ne suffit pas nécessairement à démontrer qu’on a obtenu un consentement.

Il est souvent important de pouvoir démontrer ultérieurement que, de façon générale, les sujets de la recherche ou les personnes prenant les décisions en leur nom comprenaient les conséquences de la participation à l’étude ainsi que les options de traitement raisonnables et les aspects spécifiques liés à la participation comme sujet d’étude. Ce type de renseignement n’est souvent pas adéquatement exposé dans les formulaires types. Les médecins doivent parler de ces aspects aux sujets potentiels ou aux personnes prenant les décisions en leur nom et consigner l’échange verbal dans le dossier médical.

Confidentialité

De façon générale, les médecins qui participent à une recherche ont un devoir de confidentialité à l’égard des sujets. Si, dans le cadre de la recherche, ils entendent divulguer à des tiers des renseignements médicaux personnels identifiables, ou si les autres parties participant à la recherche doivent avoir accès à ces renseignements, ils doivent généralement demander le consentement explicite des sujets ou des personnes prenant les décisions en leur nom, à moins d’une exception légale.

Comme cela a été dit plus haut, dans certaines provinces et certains territoires, les lois sur la protection des renseignements personnels exigent qu’un comité d’éthique de la recherche approuve toute recherche qui utilise des renseignements médicaux personnels identifiables sans le consentement de la personne concernée. Dans leur examen, les comités d’éthique de la recherche prennent généralement en compte divers facteurs : possibilité d’effectuer la recherche sans utiliser de renseignements personnels identifiables, nature des mesures prises pour assurer la protection des renseignements, recherche dans l’intérêt public ou non, et impossibilité pratique d’obtenir le consentement des sujets de recherche. Conformément aux normes de déontologie, les comités d’éthique de la recherche n’approuvent généralement pas l’utilisation de renseignements médicaux personnels dans des essais cliniques sans le consentement des personnes concernées.

Les lois sur la protection des renseignements personnels peuvent imposer d’autres exigences en ce qui concerne la collecte, l’utilisation et la divulgation des renseignements médicaux personnels des sujets aux fins de la recherche. Par exemple, certains territoires ou provinces peuvent exiger que les dépositaires de renseignements sur la santé (comme les médecins) signent des ententes écrites avec les chercheuses et chercheurs avant de leur communiquer des renseignements personnels. De telles ententes couvrent généralement des aspects tels que l’utilisation, la sécurité, la divulgation, le retour ou l’élimination des renseignements en question. Les médecins doivent connaître leurs obligations avant d’utiliser les renseignements sur les patientes et patients ou avant de divulguer les renseignements médicaux personnels aux fins de la recherche.

Les obligations en matière de confidentialité peuvent également découler d’autres types d’ententes. Par exemple, les ententes de recherche clinique peuvent obliger les médecins à assurer la confidentialité des détails de la recherche.

Cependant, les médecins doivent s’assurer que ces restrictions sont raisonnables et ne vont pas à l’encontre de leurs obligations légales et professionnelles. La politique de l’AMC intitulée Les interactions avec l'industrie pharmaceutique : lignes directrices pour les médecins stipule ce qui suit : « Les médecins doivent veiller à ce que les ententes conclues avec l’industrie protègent leur droit de publier ou de divulguer des données et des résultats d’étude complets et exacts, ou de signaler des événements indésirables qui se produisent pendant l’étude. » Le Code de déontologie des médecins du Québec contient des mises en garde similaires et interdit aux médecins de cacher les résultats négatifs d’essais de recherche auxquels ils ont participé, ce qui est également le cas dans d’autres provinces ou territoires.

Conflits d'intérêts

La participation des médecins à la recherche peut également soulever des questions sur la possibilité de conflits d’intérêts. Une telle situation se produit lorsque les intérêts des médecins peuvent aller à l’encontre de ceux des sujets de recherche ou des patientes ou patients. Ce peut être le cas si les médecins jouent deux rôles où ils peuvent représenter des intérêts contradictoires, par exemple à titre de chercheuses ou chercheurs et de médecins de sujets de recherche. Pour réduire le risque de conflit dans de telles situations, ils doivent lire attentivement le protocole de recherche pour s’assurer qu’il ne va pas à l’encontre de leur indépendance professionnelle et de leur jugement clinique aux fins du traitement de sujets de recherche qui est également leurs patientes et patients.

Les médecins doivent également éviter toute apparence de conflit d’intérêts dans leur relation avec des sociétés et des organisations qui subventionnent des recherches. Dans la politique de l’AMC intitulée Les interactions avec l’industrie pharmaceutique : lignes directrices pour les médecins, on trouvera des conseils sur le maintien de relations appropriées avec l’industrie. Par exemple, l’AMC suggère que toute rémunération versée à des médecins pour leur participation à une recherche se limite à un remboursement raisonnable du temps passé et des dépenses encourues, et qu’elle soit approuvée par le comité d’éthique de la recherche qui convient. De même, le Code de déontologie des médecins du Québec recommande à ceux-ci de ne pas accepter ni accorder de dédommagement susceptible de mettre en cause leur indépendance professionnelle, et que toute rétribution reçue soit raisonnable et portée à la connaissance du comité d’éthique. La plupart des Collèges ont également des politiques sur les conflits d’intérêts et la recherche clinique.

Ententes de recherche clinique

Beaucoup des aspects abordés ici peuvent être couverts par une entente de recherche clinique passée entre le promoteur de l’étude et le médecin participant. Les médecins à qui on demande de signer une entente de recherche clinique doivent en étudier soigneusement les dispositions pour s’assurer qu’elle ne va pas à l’encontre de leurs obligations légales et professionnelles. Les Questions médico-légales à considérer à l’égard des contrats de recherche clinique de l’ACPM portent sur les enjeux communément liés aux contrats de recherche clinique. En ce qui concerne les litiges découlant d’un contrat de recherche, l’assistance de l’ACPM se limite généralement aux cas où le travail médical professionnel des médecins est remis en question ou que leur capacité à exercer la médecine est menacée. L’Association prête généralement assistance pour tous les aspects du contrat de recherche clinique qui visent les soins médicaux. L’ACPM ne prête généralement pas assistance aux membres lorsque les allégations portent sur une violation de contrat, y compris l’omission de respecter une échéance ou d’atteindre le taux de recrutement convenu. On recommande aux membres de revoir le contrat avec leur juriste personnel ou d’affaires.

Étendue de l’assistance de l’ACPM

En général, pour pouvoir bénéficier de l’assistance de l’ACPM, les membres doivent déployer des efforts raisonnables pour faire en sorte qu’une entente de recherche clinique signée soit approuvée par un comité canadien d’éthique de la recherche clinique, qui peut relever d’un hôpital ou d’un organisme communautaire. Dans certaines provinces ou certains territoires, ce comité peut relever du Collège. Les principes de l’assistance sur les activités de recherche clinique de l’ACPM offrent d’autres renseignements sur l’assistance offerte par l’ACPM en cas de problèmes médico-légaux découlant d’activités de recherche clinique.


AVIS DE NON-RESPONSABILITÉ : Les renseignements publiés dans le présent document sont destinés uniquement à des fins éducatives. Ils ne constituent pas des conseils professionnels spécifiques de nature médicale ou juridique et n’ont pas pour objet d’établir une « norme de diligence » à l’intention des professionnels des soins de santé canadiens. L’emploi des ressources éducatives de l’ACPM est sujet à ce qui précède et à la totalité du Contrat d’utilisation de l’ACPM.