■ Sécurité des soins :

Amélioration de la sécurité des patients et réduction des risques

Quand les soins aux patients deviennent les propos de textos : Stratégies pour atténuer les risques

8 minutes

Publié : juin 2019

Les renseignements présentés dans cet article étaient exacts au moment de la publication

À l’époque où le premier message texte − un simple « Joyeux Noël » − a été transmis en 1992, peu de gens auraient pu prédire que cet événement révolutionnerait la communication dans le monde entier. Dans les années qui ont suivi, les messages textes sont devenus omniprésents autant dans notre vie personnelle que professionnelle, y compris dans le milieu de la santé.1

Pour aider les médecins à maximiser les avantages du textage et à en atténuer les risques, l’ACPM suggère des stratégies pour préserver la confidentialité des renseignements sur le patient, soutenir une bonne communication et prévenir des perceptions négatives. Cependant, cela soulève de nombreuses questions : le caractère approprié du textage, les risques en matière de protection des renseignements personnels, les défis en matière de communication, les préoccupations médico légales connexes. Comment y répondre?

Pour maximiser les avantages du textage et en atténuer les risques, songez à la façon dont vous pouvez préserver la confidentialité des renseignements sur le patient, soutenir une bonne communication et prévenir des perceptions négatives.

Pourquoi texter en soins de santé?

Une étude récente2 dans un hôpital canadien s’est penchée sur l’utilisation des textos chez les chirurgiens. Sur les 206 chirurgiens visés, 62 ont répondu au sondage (30 %). Cette étude a révélé que, lorsque les chirurgiens devaient communiquer aux résidents des renseignements courants concernant les patients, ils préféraient généralement le faire par textos (63 %). Ils avaient toutefois plutôt tendance à utiliser les canaux traditionnels pour communiquer entre eux : courriel (55 %) et téléphone (24 %), le recours aux textos ne représentant alors que 8 % de leurs communications. Par contre, lorsqu’il s’agissait de renseignements urgents concernant les patients, les chirurgiens préféraient généralement téléphoner à leurs collègues (90 %) et aux résidents (65 %); les chirurgiens avaient beaucoup moins tendance à communiquer par textos avec les autres chirurgiens (2 %) et avec les résidents (29 %).

Quand les chirurgiens avaient recours aux textos, c’était pour des raisons de rapidité et de commodité, et pour transmettre l’information à de multiples destinataires à la fois. Dans cette étude, 72 % des chirurgiens estimaient que le textage contribue à améliorer les soins aux patients. Alors que la plupart s’entendaient sur le fait que le textage de renseignements concernant les patients devrait être réglementé par les politiques des établissements ou par la loi, seul le tiers des répondants connaissaient la politique de leur hôpital à ce sujet.2

Vie privée et confidentialité

Texter des renseignements sur la santé permettant d’identifier un patient pourrait constituer une atteinte à la vie privée. La législation sur la protection des renseignements personnels exige que les dépositaires de renseignements personnels, y compris les renseignements sur la santé, protègent ces données du vol, de la perte et des divulgations ou usages non autorisés. Les normes de réglementation pertinentes comprennent les lois fédérales, provinciales ou territoriales sur la protection de la vie privée, ainsi que les lignes directrices établies par les organismes de réglementation de la médecine (Collèges). Ces exigences s’appliquent aux textos et aux autres voies de communication électronique.

Votre portable n’est pas chiffré ou le Wi-Fi ainsi que le réseau sans fil ne sont pas sécurisés.

  • Évitez, lorsque vous utilisez votre portable ou que le réseau n’est pas sécurisé, de communiquer des renseignements personnels sur la santé qui permettent d’identifier un patient. Utilisez plutôt des voies de communication sécurisées telles que des applications de messagerie instantanée qui chiffrent le transfert des données. Votre hôpital ou autorité en matière de santé peut vous conseiller sur les applications approuvées dans votre établissement. Si vous êtes en pratique privée, recherchez une application qui, selon les experts, convient à l’usage envisagé.
  • Vous pouvez aussi omettre tout renseignement permettant d’identifier un patient ou encore avoir recours aux textos uniquement pour des tâches habituelles telles que fixer un rendez-vous ou demander que l’on vous rappelle.

Un message est envoyé à de multiples destinataires, y compris des personnes à l’extérieur du cercle de soins du patient.

  • Si vous envoyez des textos à un groupe, demandez-vous si tous les destinataires ont besoin de connaître cette information (c.-à-d. font-ils partie du cercle de soins du patient?). Créez un nouveau groupe plus restreint, au besoin.

Un message est envoyé au mauvais destinataire. Un message est reçu par la mauvaise personne.

  • Utilisez votre liste de contacts pour envoyer un nouveau message (pour éviter ainsi de saisir chaque fois les renseignements des destinataires).
  • Si vous découvrez que vous avez transmis par inadvertance un message à la mauvaise personne, avisez-la de l’erreur, et si le message contient des renseignements de nature délicate, demandez-lui d’effacer le message.
  • Si vous recevez un message qui ne vous est pas destiné, répondez à l’expéditeur en vous identifiant par votre nom et en l’informant que vous croyez que son message ne vous est pas destiné. Quand l’expéditeur aura confirmé cette erreur, effacez le message.
  • Communiquez avec l’ACPM pour obtenir des conseils sur vos obligations en matière de déclaration de toute atteinte à la vie privée.

Les employés de votre cabinet se servent de leur portable personnel pour vous communiquer des renseignements concernant les patients.

  • Élaborez des politiques et formez votre personnel sur les exigences en matière de protection des renseignements personnels, y compris l’interdiction d’utiliser des appareils personnels pour communiquer des renseignements sur les patients.
  • Demandez à vos employés de signer une entente de confidentialité qui stipule leurs responsabilités quant à la protection des renseignements personnels sur la santé.

Votre portable est perdu ou volé.

  • Veillez à ce que l’accès à votre portable soit protégé à l’aide d’un mot de passe.
  • Ayez recours au chiffrement pour votre portable.

Clarté de la communication

Les textos peuvent présenter des défis uniques quant à la clarté de la communication. Ils peuvent faire partie de la preuve lors de procédures judiciaires ou dans un dossier de plainte auprès d’un organisme de réglementation de la médecine (Collège). Comme dans les dossiers médicaux, les Collèges s’attendent à ce que la communication soit claire et professionnelle.

Un texto contient des abréviations et un langage cryptique imprécis, ce qui accroît le risque d’une mauvaise communication.

  • Évitez d’utiliser les textos pour des sujets complexes exigeant de longues explications.
  • Écrivez les mots au long, en évitant les acronymes et les sigles, exception faite des plus courants.

L’autocorrecteur a changé la graphie des mots et vous ne l’avez pas remarqué.

  • Lisez le message attentivement, et faites toute correction nécessaire avant d’appuyer sur « Envoyer ».
  • Si possible, désactivez la fonction d’autocorrection.

Vous transmettez par texto une opinion professionnelle sur un cas clinique, peut-être pour éviter de le faire dans un rapport de consultation.

  • Traitez les textos de la même façon dont vous gérez une consultation de corridor, un rapport écrit officiel ou une consultation par téléphone ou courriel.
  • Consignez au dossier les conseils que vous donnez par texto comme vous le feriez normalement.
  • Continuez d’utiliser les rapports de consultation au besoin, ce qui facilite la consignation de vos conseils au dossier.

Vous n’avez pas reçu de réponse à votre question.

  • N’assumez pas que le destinataire a reçu votre message, l’a lu ou a le temps d’y répondre.
  • Envisagez de faire le suivi verbalement quand il s’agit de questions urgentes.
  • Après avoir reçu et lu un texto, communiquez efficacement avec les membres de l’équipe en assurant le suivi : accusez réception et précisez toute mesure requise.

Vous donnez une opinion professionnelle, mais vous ne connaissez pas le patient ni son histoire clinique.

  • Tenez pour acquis que le contenu du message texté est un rapport de consultation. Au besoin, demandez des clarifications et plus de détails, et suggérez d’en discuter au téléphone ou en personne.

Vous ne savez pas où consigner les conseils que vous avez donnés.

  • Si vous le pouvez, saisissez tout le contenu des textos pertinents (p. ex. en ayant recours à l’outil de capture d’écran), puis copiez-le dans le dossier médical.
  • Si ce n’est pas possible, résumez les communications par textos et consignez ce résumé dans le dossier médical. Certains hôpitaux pourraient avoir des politiques ou des protocoles concernant la tenue des dossiers dans de telles circonstances.

Perceptions du professionnalisme

Il peut parfois s’avérer utile de texter, mais le recours à ce mode de communication peut aussi être perçu comme un manque de professionnalisme chez un médecin. En général, les textos sont rédigés dans un style de communication décontracté, ce qui peut donner l’impression de ne pas être professionnel. De plus, le médecin qui se laisse distraire par des textos risque de compromettre ses interactions lorsqu’il est en présence de patients ou d’autres professionnels de la santé.

Vous avez tendance à vous rabattre sur un style de rédaction décontracté et non structuré.

  • Évitez un langage inapproprié ou un ton qui pourrait vous être reproché sur le plan professionnel.

Un texto comprend des renseignements de nature délicate (p. ex. des questions au sujet de la sexualité ou de la santé mentale, des résultats d’examens alarmants).

  • Il est possible que certains sujets ne puissent être discutés par textos, même si les protocoles de sécurité de l’information sont suivis. Suggérez à la personne qu’il serait préférable de parler de la question, par téléphone ou en personne.

Vous recevez un texto alors que vous avez un entretien avec un patient ou un collègue.

  • À moins que le texto ne soit de nature urgente, évitez de regarder votre portable pour y lire le message; retournez aux textos lorsque votre emploi du temps vous le permettra.

Les résidents et les stagiaires de votre hôpital utilisent généralement, par défaut, les textos comme voie de communication pour les discussions et l’apprentissage fondés sur des cas.

  • La surutilisation des textos pourrait nuire à l’efficacité des moments clés d’un enseignement et affecter les occasions d’évaluer le processus décisionnel chez les stagiaires.2
  • Encouragez votre hôpital ou les administrateurs de votre clinique à élaborer des politiques adaptées aux télécommunications mobiles.
  • Servez de modèle aux stagiaires pour ce qui est de la communication par textos.

 


 

Références

  1. Les textos et le textage réfèrent à la rédaction et à la transmission de messages électroniques à l’aide d’un téléphone intelligent, d’une tablette ou d’un ordinateur. Il s’agit d’un service d’envoi de messages courts (SMS) associé à un réseau sans fil ou fonctionnant à l’aide d’une application liée à Internet.
  2. Firdouse M, Devon K, Kayssi A, et al. Using Texting for Clinical Communication in Surgery: A Survey of Academic Staff Surgeons. Surg Innov [En ligne]. 14 mars 2018 [cité le 15 janvier 2019]; 25(3) 274-79. Disponible: https://doi.org/10.1177/1553350618761980

AVIS DE NON-RESPONSABILITÉ : Les renseignements publiés dans le présent document sont destinés uniquement à des fins éducatives. Ils ne constituent pas des conseils professionnels spécifiques de nature médicale ou juridique et n’ont pas pour objet d’établir une « norme de diligence » à l’intention des professionnels des soins de santé canadiens. L’emploi des ressources éducatives de l’ACPM est sujet à ce qui précède et à la totalité du Contrat d’utilisation de l’ACPM.