Risques médico-légaux : ce que les médecins qui prodiguent des soins pédiatriques doivent savoir

Sachez quels sont vos risques – Données par spécialité clinique

Une médecin en consultation avec un garçon et son père

Publié : octobre 2025

Des médecins de différentes spécialités (pédiatrie, médecine familiale, médecine d’urgence, psychiatrie et chirurgie) prodiguent des soins aux enfants et aux adolescent·es. Ce rapport présente les résultats d’une analyse de 2 330 dossiers ciblant des médecins, y compris des dossiers d’actions civiles, de plaintes aux Collèges et de plaintes intrahospitalières, qui ont été conclus par l’ACPM entre 2014 et 2024. Aux fins de ce rapport, on considère les soins pédiatriques comme les soins qui sont prodigués aux personnes âgées de 0 à 18 ans.

Le graphique ci-dessous montre la répartition de 2 330 dossiers mettant en cause des soins pédiatriques et ciblant 2 650 médecins, selon la spécialité médicale.

Quelles sont les spécialités médicales relevées dans les dossiers médico-légaux mettant en cause des soins pédiatriques? (n = 2 650 médecins)

Parmi les autres spécialités, on comptait l’otorhinolaryngologie, la radiologie diagnostique, la chirurgie générale, l’anesthésiologie, la neurologie et la dermatologie.

La répartition des dossiers parmi les médecins des différentes spécialités médicales tient compte du nombre de médecins pour chacune de ces spécialités. Par exemple, à la fin de 2024, l’ACPM comptait 39 992 médecins de famille (codes de travail 35, 73, 78 et 79) et 2 974 pédiatres (code de travail 61) parmi ses membres. Le graphique n’indique pas que les risques sont plus élevés pour les médecins de famille qui prodiguent des soins pédiatriques.

Quelles sont les plaintes le plus souvent émises par les patient·es et les critiques le plus couramment formulées par l’expertise médicale? 1 (n = 2 330 dossiers)

Issue Allégations des patient·es (%) Critiques formulées par l’expertise médicale (%)
Évaluation déficiente 43 18
Erreur de diagnostic 35 22
Comportement non professionnel 25 8
Problèmes de communication médecin-patient·e ou famille 20 13
Omission de réaliser un test ou une intervention 16 9
Procédure administrative inadéquate 11 9
Défaut d’orienter la personne vers un·e collègue 11 5
Processus de consentement inadéquat 11 6
Inconduite professionnelle 10 4
Surveillance ou suivi inadéquats 10 6

Les plaintes reflètent le fait que, du point de vue des personnes traitées, un problème est survenu au cours de la prestation des soins. Ces plaintes ne sont pas toujours appuyées par l’opinion de l’expertise médicale. Il arrive que l’expertise médicale n’ait pas de critiques à formuler quant aux soins prodigués, ou que ses critiques ne soient pas en lien avec les allégations des personnes soignées, de leurs parents ou de leurs soignant·es.

Les problèmes de communication entre les médecins et les patient·es, les parents ou les soignant·es sont souvent à l’origine des plaintes déposées par les personnes soignées et des critiques de la part de l’expertise médicale. En voici quelques exemples :

  • Les parents d’un nourrisson présentant une possible dysplasie de la hanche allèguent que le médecin n’a pas répondu à leurs questions, n’a pas tenu compte de leurs perceptions et a prescrit un traitement inutile à l’enfant.
  • Les parents d’une enfant asthmatique d’âge préscolaire allèguent qu’une médecin n’a pas tenu compte de leurs préoccupations et qu’elle ne leur aurait pas expliqué correctement le plan de traitement. Par conséquent, l’enfant aurait reçu son congé trop rapidement, obligeant les parents à revenir à l’hôpital quelques heures plus tard pour obtenir d’autres soins.
  • Les parents d’un enfant d’âge scolaire présentant des symptômes d’acidocétose diabétique allèguent que le médecin ne leur a pas expliqué la gravité de l’état de leur enfant et qu’il ne leur a pas conseillé de se rendre immédiatement aux urgences, ce qui aurait retardé l’administration du traitement approprié.
  • Les parents d’une adolescente présentant des symptômes cardiaques d’apparition nouvelle allèguent que la médecin ne leur a pas dit que toute activité physique devait être évitée pour réduire le risque de nouveaux symptômes ou encore de réapparition ou d’aggravation des symptômes actuels.

Les comportements non professionnels des médecins comptent aussi parmi les motifs fréquents de plainte. En voici quelques exemples :

  • Les parents d’une enfant d’âge préscolaire qui présentait une polyurie et une polydipsie allèguent que le médecin s’est montré condescendant et intimidant, et qu’il a émis des commentaires moqueurs pendant l’examen de l’enfant.
  • Les parents d’un enfant d’âge scolaire faisant de l’insomnie allèguent qu’une médecin a fait des commentaires inappropriés à l’enfant et qu’elle a remis en question leurs compétences parentales.

Quelles sont les raisons de consultation les plus fréquentes?

Le tableau ci-dessous présente les catégories d’affections le plus souvent à l’origine d’une consultation chez les patient·es des 4 groupes d’âges suivants : nourrissons/bambins (moins de 2 ans), enfants d’âge préscolaire (2 à 4 ans), enfants d’âge scolaire (5 à 12 ans) et adolescent·es (13 à 18 ans).

Nourrissons/bambins (moins de 2 ans, n = 465 dossiers)

  • Oreille (p. ex. otite moyenne)
  • Appareil respiratoire (p. ex. infections aiguës, pneumonie, bronchiolite)
  • Appareil digestif (p. ex. entérite, colite)

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  • Appareil locomoteur (p. ex. plagiocéphalie)
  • Organes (p. ex. atrésie des voies biliaires, tétralogie de Fallot)
  • Appareil reproducteur (p. ex. cryptorchidie)

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  • Tête (p. ex. hémorragie sous-durale)
  • Membres supérieurs (p. ex. fractures)
  • Membres inférieurs (p. ex. fractures)

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Enfants d’âge préscolaire (2 à 4 ans, n = 349 dossiers)

  • Oreille (p. ex. otite moyenne)
  • Appareil respiratoire (p. ex. infections aiguës, pneumonie)
  • Peau (p. ex. molluscum contagiosum)

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  • Tête (p. ex. lacérations mineures)
  • Membres supérieurs (p. ex. fractures)
  • Brûlures

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  • Autisme infantile
  • Trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité

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Enfants d’âge scolaire (5 à 12 ans, n = 771 dossiers)

  • Appareil respiratoire (p. ex. infection des voies respiratoires supérieures, pneumonie)
  • Peau (p. ex. verrues d’origine virale, molluscum contagiosum)
  • Otite moyenne et gastroentérite d’origine virale

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  • Tête (p. ex. lésions non compliquées)
  • Membres supérieurs (p. ex. fractures)
  • Membres inférieurs (p. ex. fractures)

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  • Trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité
  • Trouble des conduites

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Adolescent·es (13 à 18 ans, n = 749 dossiers)

  • Tête (p. ex. commotions cérébrales)
  • Membres supérieurs (p. ex. fractures)
  • Membres inférieurs (p. ex. fractures)

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  • Dépression
  • Anxiété/trouble anxieux généralisé
  • Trouble bipolaire
  • Troubles de l’humeur

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  • Appareil respiratoire (p. ex. pharyngite)
  • Peau (p. ex. verrues d’origine virale)

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  • Trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité

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La fréquence des raisons de consultation citées dans les dossiers médico-légaux reflète vraisemblablement les pratiques des médecins et ne témoigne pas nécessairement du risque élevé des affections en cause. Un dossier peut compter plus d’une affection, et concerner plus d’un·e patient·e.

Dans les 517 dossiers, on a fait état d’une erreur de diagnostic, y compris un diagnostic erroné, manqué ou tardif. Dans 56 % (291/517) des dossiers, l’expertise médicale a critiqué une évaluation déficientepar les médecins. Par exemple :

  • Omission d’élargir l’éventail des diagnostics possibles pour expliquer une détresse respiratoire grave chez un nourrisson et, par conséquent, de diagnostiquer un trouble métabolique sous-jacent.
  • Défaut d’effectuer une évaluation approfondie (aucune tomodensitométrie abdominale demandée) chez un adolescent après un accident de vélo et, par conséquent, de diagnostiquer une lacération splénique.

Dans 31 % (161/517) des dossiers d’erreur de diagnostic, l’expertise médicale a critiqué la tenue de dossiers inadéquate des médecins. Par exemple :

  • Dans le cadre de plusieurs consultations virtuelles avec une enfant d’âge scolaire, un médecin a utilisé un modèle préformaté qui omettait plusieurs renseignements importants : raison de la consultation, résultats du bilan fonctionnel approfondi, symptômes détaillés, plan de traitement clairement défini, diagnostic (avec le diagnostic différentiel) et suivi. Par conséquent, il a mis du temps à orienter l’enfant vers les urgences, ce qui a retardé le diagnostic d’acidocétose diabétique.
  • L’expertise médicale a souligné qu’une médecin avait omis de consigner au dossier suffisamment de renseignements sur une maladie récente, les contacts avec des gens malades, les antécédents médicaux, les signes vitaux et le tableau clinique général d’une pneumonie chez un enfant d’âge scolaire. L’antibiotique choisi et la raison du traitement n’ont pas non plus été versés au dossier. Un diagnostic erroné a été posé, et l’enfant n’a pas reçu le bon antibiotique.

Quels sont les facteurs associés à un préjudice grave 2 dans les dossiers médico-légaux? (n = 2 330 dossiers)

Factors associated with severe patient harm.

Facteurs liés aux patient·es 3

Affections :

  • Diabète sucré
  • Maladies inflammatoires du système nerveux central
  • Troubles épisodiques et paroxystiques
  • Grippe et pneumonie chez les nourrissons
  • Infections bactériennes graves, y compris un sepsis

Affections concomitantes :

  • Obésité et autres troubles de suralimentation chez les adolescent·es
  • Troubles mentaux et comportementaux attribuables à la consommation d’une substance psychoactive chez les adolescent·es
  • Malformations congénitales du système cardiovasculaire
  • Malformations congénitales et anomalies chromosomiques

Facteurs liés aux médecins 4

  • Évaluation déficiente
  • Omission de réaliser un test ou une intervention
  • Défaut d’orienter la personne vers un·e collègue
  • Prise en charge inadéquate (p. ex. ne pas évaluer un·e patient·e soi-même et se reposer uniquement sur l’évaluation d’un·e médecin en résidence)
  • Décisions inappropriées concernant la prise en charge (p. ex. ne pas orienter une personne vers les urgences pour confirmer la présence d’un diabète d’apparition nouvelle soupçonné)
  • Congé prématuré (p. ex. accorder un congé à une personne immunodéprimée et fébrile sans lui avoir d’abord prescrit des antibiotiques)

Facteurs liés à l’équipe 4

  • Problèmes de communication avec d’autres médecins
  • Consignes de sortie inadéquates fournies à la personne traitée, ses parents ou ses soignant·es
  • Tenue de dossiers inadéquate

Facteurs liés au système 4

  • Procédure administrative inadéquate (p. ex. défaut de remplacer les médecins ou d’assurer le suivi des patient·es durant les vacances ou les absences, absence de politique visant à fixer des rendez-vous de plus longue durée pour une évaluation approfondie)

Aide-mémoire pour réduire les risques

Au cours d’un examen approfondi des dossiers médico-légaux ciblant des médecins prodiguant des soins pédiatriques, nous avons dégagé certains points à considérer pour réduire les risques rattachés à ce type de soins.

  • Tenir compte des antécédents de l’enfant ou de l’adolescent·e, y compris l’historique de la naissance, les étapes importantes du développement, les affections concomitantes, les traitements médicamenteux actuels et les vaccins reçus. Réaliser des évaluations et des investigations appropriées selon l’âge de la personne traitée.
  • Prendre le temps de s’arrêter et de réfléchir au diagnostic différentiel en s’assurant d’envisager toutes les possibilités qui pourraient menacer la vie de l’enfant ou de l’adolescent·e (p. ex. acidocétose diabétique, méningite, sepsis). En cas d’incertitude concernant le diagnostic, envisager de demander l’avis d’un·e collègue.
  • Fournir aux patient·es, aux parents ou aux soignant·es des consignes de sortie exhaustives, verbalement et par écrit, notamment en ce qui a trait aux traitements médicamenteux, aux soins de suivi, aux signes ou aux symptômes à surveiller ainsi qu’aux situations exigeant de solliciter un avis médical. Expliquer clairement à quel moment il importe de consulter en cas de complications, et vers qui se tourner. S’assurer que les patient·es ou leurs parents ont compris l’information fournie.
  • Consigner au dossier les antécédents médicaux (y compris les symptômes et les affections concomitantes), les résultats de l’examen physique, les réévaluations, les investigations, les diagnostics différentiels ainsi que les diagnostics soupçonnés ou confirmés, y compris le raisonnement diagnostique. Ajouter tout plan de traitement ainsi que les directives relatives au suivi qui ont été communiqués aux patient·es, à leurs parents ou à leurs soignant·es. Il est également important d’inclure toute communication avec d’autres spécialistes ou professionnel·les de la santé ayant participé aux soins.

Limites

Les nombres qui figurent dans ce rapport sont tirés des données médico-légales de l’ACPM. Les dossiers médico-légaux de l’ACPM ne représentent qu’une petite proportion des incidents liés à la sécurité des patient·es. De nombreux facteurs peuvent inciter une personne à intenter une poursuite ou à déposer une plainte, et ces facteurs varient grandement en fonction du contexte. Les dossiers médico-légaux peuvent donc être une précieuse source d’information sur des sujets importants, mais on ne peut les considérer comme représentatifs de l’ensemble des incidents liés à la sécurité des patient·es.

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Notes

  1. Par expertise médicale, on entend les médecins experts et expertes qui interprètent les problèmes cliniques, scientifiques ou techniques liés aux soins prodigués et qui émettent une opinion à leur égard. Ces médecins ont habituellement une formation et une expérience semblables à celles de leurs collègues ayant prodigué les soins à évaluer.
  2. Comprend les préjudices graves pour les patient·es ainsi que le décès. Selon le glossaire du service de recherche de l’ACPM, un préjudice grave pour les patient·es est défini comme symptomatique, dictant une intervention nécessaire à la survie ou une intervention médicale ou chirurgicale majeure, entraînant une diminution de l’espérance de vie, ou causant, de façon permanente ou temporaire, une perte fonctionnelle ou un préjudice majeurs.
  3. Les facteurs liés aux patient·es regroupent toutes les caractéristiques ou les affections médicales présentes au moment de la consultation médicale, ou tout événement survenant durant la consultation.
  4. D’après l’opinion d’expertes et d’experts.